This
article addresses issues related to the power of leaders’ words of religious denominations
in Africa. The purpose is to answer the following fundamental questions:
on what subjects and to what extent, indeed, should African Church and its leaders
possibly have room for public speech? Does African Church own a floor for legitimacy
to speak in the public and for what reason? Should the Church preach only the
Gospel and avoid speaking of non-religious matters, such as politics to the
public?
What
challenges do African Church leaders actually face when they dare denounce maltreatment
of their peoples? Bearing in mind the Church challenges, how much more
tactfully and wisely should Church leaders behave in delivering their speeches
to the public? Furthermore, given that Africa is a continent rich in oral
civilization, what specific words should the Church leaders use to talk to
African societies about their problems? On which ground, definitely, could
African Church authorities stand, for the legitimacy of their words to the
public, and how should the Church assume responsibility of its words, so as not
to tarnish the overall image that African societies have of it? Finally, the
key question African Christians should ask is, “how should African Christians
express themselves in their societies?” Two approaches were applied to answer
those questions. The first is biblical readings to analyze the weight of the
Word of God in speech. The second is biblical analysis and interpretation, to emphasize
that, the role of the Church is not merely delivering sermons, but publically engage
people in action, by applying the Word, for their liberation from any oppression.
Therefore, to alleviate the challenges Christ’s Church of Africa faces, its leaders
should embark on socio-political debate instead of eluding it. That will be the
best way to remove “aphasia” on public politico-societal issues.
1.
Localisation
de la question de l’espace public dans son contexte
Sur quels sujets et dans quelle mesure
la parole de l’Église africaine et de ses
responsables est-elle requise ou même
possible dans l’espace public? L’Eglise africaine a-t-elle une légitimité à
prendre la parole dans l’espace public et dans quel but doit-elle la prendre?
Doit-elle se mettre uniquement au service de l’Évangile et éviter de prendre la
parole dans l’espace public ?
Telles sont les questions récurrentes
qui se posent et requièrent nécessairement une
réflexion. Car, il faut noter que
l’espace public des sociétés africaines a toujours été un «lieu » de prise de
parole, de délibération et d’action. C’est un lieu où, idéalement, se forme la
volonté commune, où s’entrechoquent les idées, les intérêts et les initiatives
des citoyens qui cherchent à édifier le bien commun. C’est là où se tiennent
les médiations incarnant l’ « usage public de la raison ». Il n’en demeure pas
moins que tous les citoyens sont conviés à entrer dans cette institution de
base de la société. C’est « l’arbre à palabre », l’appelle-t-on. L’Eglise
africaine, dans la diversité de ses mutations, n’est pas en reste puisque ses
membres sont invités, eux aussi, en leur nom propre ou à titre de représentants
officiels, à faire entendre leurs voix, dans l’espace public, lors de débats sociaux
à connotation morale.
C’est dans cette perspective qu’elle
doit se présenter aujourd’hui comme une Eglise interpellée à la prise de paroles
nouvelles: des paroles engagées, des paroles sociétales, des paroles
culturelles, des paroles d’encouragements, des paroles de soutien, des paroles
contributives. En d’autres termes, les Églises africaines ne peuvent plus être
au service d’une parole figée. Elle se doit de s’engager dans une prise de
parole sage, pesée, courageuse, qui va à la rencontre d’autres paroles, en reconnaissant
la validité d’autres démarches sociétales, culturelles et politiques. Elle se doit
de se garder tout à la fois contre la tentation de la respectabilité (mutisme
pleutre) et contre celle du pouvoir (conquête du politique). Il s’agit de se
concentrer sur ses missions essentielles: l’annonce de l’Évangile, l’âpre
défense des libertés religieuses et l’expression décomplexée de ses convictions
dans la cité.
En d’autres termes, l’initiation à une
parole risquée devant la sollicitation d’un peuple soumis à la servitude est un
devoir. C’est dire qu’une prise de parole dénonciatrice et engagée de l’Église
est une nécessité pour un peuple opprimé. Michel Bertrand l’a si bien souligné
: « c’est la parole que l’Église en tant que corps constitué, institué, visible
socialement, peut faire entendre. Que ce soit à travers des débats, des
conférences, des tables rondes ou à travers les déclarations de ses
responsables. » (Bertrand 2011 : 11-12).
Ne perdons pas de vue que l’Église
africaine garde toujours l’unique réalité qui permette aux populations de
continuer à vivre et à espérer en des lendemains meilleurs. C’est pourquoi,
l’Église ne peut plus uniquement se limiter à l’assistance humanitaire, mais elle
se doit aussi de se créer un espace de prise de parole à partir duquel le
peuple pourrait réapprendre à parler de sa
société. C’est dire que l’enseignement social de l’Eglise valorise l’engagement dans la
vie des communautés politiques. Toutefois, une question se pose: face à la
sécularisation accrue et la crise des institutions politiques de nos jours,
l’Eglise africaine a-t-elle un espace pour dire une parole publique qui soit entendue
?
Car, en dépit de l’inflation
spirituelle bien connue en Afrique, les sociétés se sont émancipées du pouvoir des Eglises. En
d’autres termes, la modernité s’est construite sur le modèle libéral d’une
dissociation stricte des valeurs privées et des normes publiques.
Ainsi, elle s’est radicalisée au point
d’exclure la religion de l’expression publique, sociale ou politique. Tout est
désormais passé au crible de l’examen critique : les idéologies politiques mais
aussi les religions, le développement de la science et les idéaux de changement.
L’on redécouvre que la séparation entre spirituel et temporel génère une certaine
crise de confiance.
C’est pourquoi, d’ailleurs, la
question de la légitimité et de l’autorité des paroles dites par les autorités ecclésiastiques se
pose aujourd’hui dans la société africaine. Certains pensent qu’il est normal,
souhaitable voire nécessaire que les Eglises, en tant que partie du corps
social, prennent part, par la voix de leurs responsables, aux débats de la
société et s’engagent dans la vie publique… D’autres contestent la légitimité de
toute intervention des autorités ecclésiales dans le champ temporel souvent
assimilé à « la politique ». Ils y sont opposés par principe, affirmant que les
Eglises doivent s’en tenir à leur mission spécifique qui est d’ordre spirituel.
Enfin, il y a ceux qui considèrent que les Eglises devraient, d’une manière
générale, se taire ou rester discrètes dans l’espace public, et ne prendre
position que face aux situations intolérables, quand la vie des humains et
celle du monde sont gravement menacées (Bertand 2011 : 11-12).
Mais, avant d’aller plus loin,
marquons un temps d’arrêt pour souligner quelques dérives quant à la parole des
Églises dans l’espace public. Car, l’aplatventrisme
de certains responsables d’Église face au pouvoir est à déplorer. En d’autres
termes, la position ambigüe de certaines
autorités ecclésiastiques vis-à-vis des dérives de certains régimes
totalitaires est un facteur déterminant dans la souffrance du peuple. En effet,
la posture de certaines Eglises traduit de fois, une neutralité qui consiste à
dire que l’Évangile n’aurait rien à dire concernant la vie sociale, économique,
culturelle, et doncpolitique des humains. Il ne serait
que lumière intérieure, cachée « sous le boisseau».
Pourtant, la Parole, dite « parole de
l’Église », doit être, avant tout, « évangélique ». Par « évangélique », il
faut entendre clairement que dans la parole de l’Église, il faut qu’il y ait
une intelligence de l’Évangile, des raisons évangéliques qui engagent l’Église
à prendre la parole. Le courage et la volonté politique ou sociale permettront
ainsi l’Église de retrouver son rôle de sentinelle qui consiste à dire ce que
Dieu lui fait entendre de Sa volonté pour l’humanité qu’Il aime.
Malheureusement, dans la manière dont
elles se donnent à penser à nous actuellement, les paroles des Eglises
d’Afrique demeurent aujourd’hui compromises, ambigües et pleines
d’interrogations. C’est dans cette optique que cette réflexion se donne pour ambition
de chercher à traiter les questions liées à la place que doivent occuper les paroles
des Eglises dans la société africaine. L’Afrique, étant un continent de
civilisation orale, quel type de paroles l’Eglise doit-elle tenir proprement
dans la société? Qu’est-ce qui peut fonder l’autorité et la légitimité de la
parole des autorités d’Eglise en Afrique ? Comment l’Eglise doit-elle prendre
parole, pour ne pas ternir l’image globale que la société africaine a d’elle ?
Toutes les questions évoquées un peu
plus haut ne peuvent être éludées. Car, la question qui se pose à nous, chrétiens
d’Afrique, concerne la manière de nous exprimer dans notre société. Il est à
noter que l’homme africain vit aujourd’hui dans une multitude de conceptions
dans lesquelles il se sent responsable de sa société, de son aménagement et de
son maintien. De plus, dans une Afrique marquée par la souffrance, la violence,
les injustices de toutes sortes et le sous-développement, l’interpellation
lancée à l’Eglise africaine aujourd’hui n’est non seulement de proclamer l’Evangile,
mais aussi celle de la prise de parole pour une libération socio-économique,
politique et culturelle au lieu de rester silencieuse devant l’écrasement des
faibles par les oppresseurs. C’est dire que l’émergence des Églises africaines
réside aujourd’hui dans le « pouvoir de produire une parole autre, hors des
sentiers battus et des certitudes habituelles » (Kä Mana 1993: 48). En d’autres
termes, l’Église africaine comme lieu d’expression de vie, de foi et surtout d’espérance,
a besoin de se redéfinir en recherchant une nouvelle manière de la prise de parole
sage et décomplexée dans la société.
Pour ce faire, confrontée à la
pauvreté chronique d’une population victime de l’exploitation et de
malversations, tant locales qu’étrangères, si l’Église agit en collaboration
avec les composantes de la société civile, n’est-elle pas en droit de dénoncer
l’ordre injuste qui empêche le peuple africain de consolider son développement
et le peuple de Dieu d’être véritablement « sel de terre » et « lumière du monde
» ? Faut-il se taire, sombrer dans l’indifférence, passer outre et poursuivre
son chemin comme le prêtre et le lévite de la parabole du Bon Samaritain ? Ou
a-t-on le devoir de se tenir en éveil, de se révolter, de s’indigner, comme
Jésus avec les vendeurs du Temple : « Ma maison sera une maison de prière, et
vous en faites une caverne de voleurs » (Mt 20,13) ?
Face à ce qui s’apparente à une
démission généralisée en Afrique et même au sein de nos Églises, cette
réflexion se doit de mettre l’accent sur l’importance et la capacité de l’Eglise
africaine à s’exprimer sur les questions socio- politiques par la voix de ses «autorités
», sur sa légitimité à prendre parole et sur l’autorité d’une telle parole dans
la société d’aujourd’hui. Aussi, il s’agit d’identifier le statut de la parole
que l’Eglise africaine est en mesure de faire entendre à l’extérieur. Dit
autrement, dans quelle mesure et dans quelles limites la parole des autorités
ecclésiales peut être entendue comme la « voix de Dieu » ? Mais aussi dans
quelles formes cette parole doit être élaborée et exprimée ? Telles sont les
principales questions que nous nous posons.
Il convient de préciser que nous
aborderons ce sujet en tant que bibliste et cela nous obligera à faire une analyse
synchronique. Ce champ d’étude sera balisé par l’analyse de certains textes
bibliques. Entre cette perspective biblique et situation concrète, nous procéderons
à une démarche dialectique. Une tâche d’analyse qui consistera à aller au-delà d’une
simple observation et chercher à comprendre comment l’Eglise d’Afrique peut
trouver une modalité de la prise de parole à partir de l’Evangile.
Ainsi, notre étude sera une démarche à
deux volets : d’abord, il conviendra de faire l’analyse de quelques textes
bibliques. Il s’agit en effet de s’interroger si les textes bibliques peuvent
apporter un éclairage sur ce que nous appelons la prise de « parole de l’Église
». Ensuite, la deuxième partie, avec l’appui de l’analyse biblique, nous
permettra de souligner que l’importance de la prise de parole des Eglises en
Afrique ne doit pas, seulement donner lieu à des sermons mais exige aussi une
prise de parole engagée dans l’espace public. En définitive, le but de cet
article est précisément de montrer que le temps est venu d’aborder
courageusement les questions fondamentales suscitées par la prise de paroles
des Eglises d’Afrique dans l’espace socio-politique. Personne ne peut nier que
l’Eglise doive se préoccuper du problème qui est posé aujourd’hui par une Afrique
blessée par toutes formes de dominations d’une part, et par la mauvaise gouvernance,
la pauvreté et la souffrance d’autre part. Il faut, à cet effet, des paroles d’Eglise
qui protestent contre la corruption, l’injustice et l’autocratie…et montrent
que tous ces maux ne sont pas une fatalité. Cela va de l’intégrité de la foi
chrétienne que nous défendons.
2.
La
Parole de Jésus dans l’espace public
La Bible souligne le but de la venue
de Jésus sur terre: annoncer au monde la Parole de Dieu. De nombreux textes
bibliques font référence. La finale de Matthieu: « Allez de toutes les nations,
faites des disciples » (Mt 28, 19) ou encore les mots de Paul : « Comment croiraient-ils en lui, sans
l’avoir entendu ? Et comment l’entendraient-ils si personne ne le proclame ? » (Rm 10,
17). Il y a d’autres passages du livre des Actes des Apôtres où l’on voit les
premiers témoins porter l’Évangile dans les lieux les plus divers et parfois
les plus improbables: sur des places publiques, en pleine nature, dans des maisons
particulières, au temple, dans les synagogues et jusque dans les tribunaux ou les
résidences des puissants de ce monde.
De même, tout au long des textes
bibliques, nous suivons un va-et-vient entre ceux qui nous disent la puissance
de la parole et ceux qui nous disent sa vanité. Car il est parfois important de
se délier d’une parole devenue trop lourde, d’une promesse qui devient une
idole, d’une malédiction qui devient meurtrière. Nous avons de nombreux exemples,
dans la Bible, de ces paroles dont les engagements sont déliés. Il est pourtant
important et parfois vital de sortir du vain bavardage pour lancer une parole à
laquelle nous tenons, et qui nous tient. Seul un archipel de paroles fidèles
nous permet de faire face avec confiance à l’océan d’imprévisibilité des
affaires humaines (Mt 4.4). Ainsi, les évangélistes nous informent sur l’impact
qu’apporte la Parole de Jésus dans l’espace public (Mt 8,16 ; 9,35, 36sv).
À travers tous les évangiles, il est
mentionné que la « foule » de la rue, l’agitation des individus dans l’espace public (rue,
places, échoppes, bords de lac, etc.), les gens affairés à leur occupation, les
pêcheurs, les artisans, les marchands, les soldats, ceux qui ont activités en
plein air de manière générale, « eux aussi » veulent entendre la « Parole de Dieu
». En effet, le parcours des évangiles nous fait découvrir trois éléments
importants impliquant donc l’efficacité de la prise de parole de Jésus dans
l’espace public. Les paroles de Jésus se définissent ainsi :
2.1. Parole libératrice
Premièrement, c’est que la rencontre
avec les plus vulnérables et leur libération constituent un impact vivant de
l’efficacité de la Parole de Jésus. Cette Parole dans l’espace public n’est
donc pas simplement une conséquence de la foi ou une mise en œuvre de la Parole de Dieu, elle est révélation de
la présence de Dieu lui - même au cœur de l’humanité blessée, qui invite à la
réconciliation et à la communion. La parole et l’action, venant de Dieu et de
l’homme, deviennent fusionnelles dès lors qu’elles conduisent à une expérience
de libération, de relèvement ou de reconnaissance. De telles expériences sont
racontées dans la Bible et peuvent se vivre au présent en prenant la forme du
récit. La Parole fait ainsi naître des paroles, des témoignages, qui vont résonner
avec elle et vont lui donner chair pour aujourd’hui. La métaphore de la Bible comme
« nourriture » de l’expérience croyante n’est évidemment pas anodine. Elle interpelle
l’Église à une solide annonce de l’Evangile sous une forme ou sous une autre.
Ainsi, l’action des Eglises ne peut
pas se réduire à la seule prédication, elle doit apporter la vie et la
guérison, partout où le Royaume se construit et avance.
2.2.
Parole
effective
Deuxièmement, Jésus a un mode de
présence à la fois fort et discret dans l’espace public, ne cherchant jamais à
s’imposer, c’est ce qui fait de sa parole une parole conséquente et puissante.
En fait, sa parole vaut par la présence qu’elle assure, le message qu’elle communique et
l’échange qu’elle rend possible. Jésus est ainsi serviteur dans la façon même
dont il entre en relation avec les hommes par sa parole (ou son silence), qui
fait émerger le désir profond de chacun sans être systématiquement (mais souvent)
complétée par ce «service» singulier qu’est la guérison d’une personne. Chacun peut
alors avec profit se demander quels gestes, paroles, manières d’être du Christ
le touchent et lui permettent d’entendre aujourd’hui la Bonne Nouvelle.
2.3.
Parole
salvatrice
Troisièmement, la parole de Jésus dans
l’espace public se définit comme la Parole de salut qui ne revient pas au Seigneur
vide. Car, cette Parole « va jusqu’au point de partage de l’âme et de l’esprit,
des jointures et des moelles ; elle juge des intentions et des pensées du coeur » (He 4,12) et
doit avoir un effet manifeste. Elle est la Parole qui est “sortie” de Dieu et
qui « s’est fait chair » (Jn 1,14). C’est pourquoi, il est vital qu’aujourd’hui l’Eglise sorte des
arcanes des dogmes pour annoncer l’Evangile à tous, dans tous les lieux, dans toutes les
occasions, sans délai, sans répulsions et sans peur (cf. Exhortation Apostolique Evangelii gaudium, Francis [Pope] 2014 :
23). Et, elle doit se faire en obéissance au mandat missionnaire du Seigneur et
avec la certitude de sa présence au milieu de nous jusqu’à la fin du monde (cf.
Mt 28,20). C’est ce qui détermine l’Église comme porteuse de
la Parole de vérité (Jn 8,32). Ainsi, l’Église se doit de se définir comme
servante de la Parole du Dieu puissant qui éclaire, protège et défend, guérit
et libère. « On n’enchaîne pas la parole de Dieu ! » (2 Tm 2,9). Car, pour elle,
beaucoup de nos frères et soeurs sont en prison et beaucoup d’autres ont versé
leur sang comme témoignage de leur foi en Jésus Seigneur.
À la lumière de ce qui précède, nous
relevons que Jésus est venu dans le monde pour soulager la misère humaine et
combattre toute forme de marginalisation. Son ministère est destiné à ceux qui,
autour de lui, sont touchés par la souffrance : personnes dans le deuil,
paralytiques, lépreux, aveugles, sourds, muets. Ainsi, il est impossible
d’accepter que l’oeuvre d’évangélisation de l’Eglise puisse ou doive négliger
les questions extrêmement graves, tellement agitées aujourd’hui, concernant la
justice, la libération, le développement et la paix dans le monde. En ce sens,
l’évangélisation doit consister à dénoncer et à combattre ce qui avilit
et détruit l’homme. Car, l’accomplissement de la mission de l’évangélisation dans le
domaine social qui fait partie de la fonction prophétique de l’Église, comprend
aussi la dénonciation des maux et des injustices. C’est pourquoi l’écoute de la
parole de foi des personnes démunies constitue un véritable chemin spirituel,
qui ouvre aux autres chrétiens une relation renouvelée à la Parole de Dieu :
quels moyens pouvons-nous alors nous donner pour entendre les plus fragiles commenter
l’Evangile ? Enracinée dans la Passion du Christ et dans l’histoire souffrante de
l’humanité, la parole des pauvres nous ouvre en outre à la dimension collective
d’un engagement social. Lorsque les chrétiens prennent en compte la parole des
pauvres comme faisant partie de la révélation de la présence de Dieu dans notre
histoire, ils se portent à leurs côtés pour contester les structures injustes
de la société. En fraternité avec les personnes démunies, ils s’engagent alors
publiquement dans une démarche politique de protestation, d’interpellation et
de proposition. Les prophètes de l’Ancien Testament avaient initié cette
attitude du croyant avocat des pauvres, que Jésus a reprise à son compte. De
nos jours, l’action de type prophétique, fondée sur une cohérence de vie en
relation aux personnes fragiles, demeure un modèle de mise en pratique de la
Parole de Dieu. Cette démarche prolonge ainsi la Parole de Dieu dans l’espace
public, à partir des lieux où l’humanité est menacée ou meurtrie.
C’est ainsi que Jésus oppose
l’attitude des grands de ce monde qui se font appeler bienfaiteurs tandis qu’ils tiennent
leurs sujets sous leur domination, à l’attitude qu’il voudrait voir ses disciples, faite de
service mutuel (Lc 22.24-27). On parle pouvoir, il répond service. Cette réaction
s’inscrit dans la volonté du Père. Tout au long de l’Ancien Testament, Dieu va
s’efforcer de limiter, de contester le pouvoir et la mégalomanie des rois, de
lutter contre les déviations religieuses qu’ils ont provoquées. Au final, s’il
est une idée à retenir dans l’acte de la prise de Parole de Jésus dans l’espace
public, c’est bien celle-ci : prendre la parole dans l’espace public, c’est
partager les joies et les espoirs, les tristesses et les angoisses des hommes
de ce temps, des pauvres surtout et de tous ceux qui souffrent. C’est dans
cette optique que Jésus annonce le « Royaume de Dieu ». C’est le centre de la
vie et du message de Jésus : « Proclamez que le Royaume est tout proche.
Guérissez les malades, ressuscitez les morts, purifiez les lépreux, expulsez
les démons » (Mt 10,7). Nous verrons plus loin les implications de l’avènement
du royaume, du point de vue de la mentalité, du comportement et des activités
de l’Église. Le but n’est pas l’Église elle-même, mais que le monde change, que
le Royaume advienne. C’est le sens de la prière du « Notre Père », la prière
que Jésus enseigna à Ses Disciples : « Que ton règne vienne !» Par conséquent,
l’Eglise doit se décentrer elle-même, ne pas croire qu’elle a achevé sa mission.
Son projet pastoral est une démarche de la prise de parole dans l’espace public.
Le Royaume de Dieu est une intervention de Dieu dans les affaires des hommes.
Cette action se réalise en Jésus qui libère les hommes de ce qui les empêche de
vivre en plénitude.
Cela revient à dire que le critère
principal du Royaume, c’est que les petits, les faibles,
les démunis et les marginaux soient
promus à une catégorie sociale élevée et que les exclus participent à la fête. La prise
de parole de Jésus dans l’espace public renverse ainsi toutes les barrières politiques,
culturelles et sociétales et met en péril les tabous: par exemple, Jésus et les
gens de mauvaise vie (Mt 9.11 ; 11.19). Mais, l’exemple le plus remarquable est
certainement celui de l’histoire de la Samaritaine. Une barrière dénominationnelle,
apparemment infranchissable, séparait cette femme samaritaine, de Jésus. Jean
4.9 : « La femme samaritaine lui dit : Comment toi, qui es Juif, me demandes-tu
à boire, à moi qui suis une femme samaritaine? Les Juifs, en effet, n’ont pas
de relations avec les Samaritains ». Mais, Jésus est passé outre à cette
barrière.
L’Évangile montre que la prise de
Parole est une manière pour Jésus d’aller jusqu’au bout de son projet, de nous rejoindre
comme nous sommes, là où nous en sommes; de nous aimer au-delà de ce que nous
faisons ou ne faisons pas, au-delà de nos mérites ou de nos fautes (Mc 2.17b).
3.
Parole
d’Église dans l’espace public: une urgence évangélique
Dans un contexte tel que celui que
nous vivons aujourd’hui en Afrique, avec toutes les limites d’une Église sainte
et pécheresse, cette dernière est encore le socle qui cimente la société, les
diverses sensibilités, contradictions et antagonismes. Envers et contre tout, elle
est un signe d’espérance, un îlot de partage et un lieu de rencontre au sein
des confrontations politiques et sociétales. Elle arrive encore à rassembler
les enfants de Dieu incapables de se relever, à ressouder les fractures, et à
colmater les brèches sociales. C’est pourquoi, il appartient à l’Église africaine
d’être à la fois humaine et divine, visible et riche de réalités invisibles,
fervente dans l’action et présente dans le monde. Mais que doit-elle faire pour
que sa prise de parole soit audible dans l’espace public? Cette question
a-t-elle un sens ? Peut-on dire qu’il y a une spécificité de la prise de parole
de l’Église dans l’espace public ? À première vue, ce n’est pas si évident. La plupart
des Églises en Afrique ne sont pas vues comme l’exemple à suivre.
Pourtant, ces Églises sont appelées à
être à la fois humaines et divines, visibles et riches de réalités invisibles,
ferventes dans l’action et présentes dans le monde. Car, changer le monde » est
la mission de l’Église qui, pour ce faire, doit s’adapter à une nouvelle manière
de la prise de parole.
Mais, peut-elle aller plus loin dans
cette démarche ? Oui, en ayant le courage et la volonté de porter un regard lucide sur
ce qui l’empêche de jouer son rôle médiateur dans la société, sur les
compromissions des uns et des autres. Dans un pays où les Églises jouent un tel
rôle social et moral, elles doivent exiger des autorités politiques d’avoir toutes
les garanties de leur droit d’expression et simultanément, elles doivent
refuser d’être instrumentalisées au moyens des subventions ou par des
nominations à des postes de responsabilités. Mais pour cela, nous évoquerons,
entre autres, deux défis qui sont à relever :
3.1. Les défis du rapport au
politique
Le rapport entre l’État et les Églises
en Afrique est souvent source de controverses parce qu’il apparaît de plus en
plus ambigu. Une des craintes souvent exprimées dans l’espace public africain,
notamment parmi la population, est qu’il n’y a pas de neutralité de l’État vis-à-vis
de l’Église. En d’autres termes, la réalité du rapport entre l’État et l’Église
renvoie à la manipulation des sentiments identitaires des populations et des
différences religieuses. Le rapport Église-État se lit à l’aune de l’appartenance
à une confession religieuse privilégiée, à une posture politique ou ethnique,
c’est-à-dire, les responsables des pouvoirs politiques, fidèles de l’une ou de
l’autre religion, ignorent les autres et se savent adeptes d’une confession
religieuse particulière dans un champ pluraliste des religions diversifiées.
Il y a aussi ce malaise subtil,
inodore, silencieux qui est celui que crée constamment l’appartenance du Chef
de l’Etat à une communauté religieuse, au sein de la communauté des croyants.
Ce malaise reflète soit la crainte d’une défaveur politique, soit la quête d’un traitement de
faveurs de certaines Églises auprès de l’Etat. De toute façon, il y a certaines pratiques
anti-laïques qui suscitent des interrogations aujourd’hui : lorsque les
responsables d’Église sympathisent avec l’homme politique, se familiarisent avec
lui, formulent une apologie de sa politique, peut-on encore parler de laïcité
dans cet État ? Lorsque les religieux se réjouissent des dons octroyés par les
politiques à des fins électoralistes, la prise de parole de l’Église peut-elle
encore avoir son sens? Le dilemme est là : soit l’homme de Dieu adresse trop de
requêtes à l’homme politique et celui-ci en profite pour l’assujettir, soit on
ne le sollicite pas et on se conforme aux exigences de la véritable prise
parole. Ce qu’il faut comprendre aussi, c’est l’alternative que le politique a tendance
à placer devant l’Église : ou bien celle-ci est pour la majorité
présidentielle, de ce fait, elle bénéficie de certaines faveurs présidentielles
ou bien, elle est dans une posture neutre et sa neutralité s’interprète comme
une allégeance à l’opposition.
Par voie de conséquence, tout ce que
l’Eglise prendra comme posture sera interprétée selon cette grille de lecture
par le pouvoir politique. Du coup, voir l’Église aller sur le
terrain de la politique politicienne est particulièrement sensible et
passionnel, propice aux jugements, aux exclusives et considéré comme ferment de
division de la communauté. Ce qui est redouté c’est le « parti pris » éventuel de
telles postures. Il est alors reproché aux responsables d’Églises de se mêler
de ce qui ne les regarde pas, de se faire instrumentaliser de manière partisane
dans un jeu de rapports de force, d’entrer dans des logiques de pouvoir, au
lieu de se consacrer à leur mission spécifique d’annoncer l’Évangile.
Ce qui est encore plus révélateur chez
ces responsables d’Église, c’est leur volonté d’être instrumentalisés par des
leaders politiques, au lieu de se consacrer à leur mission spécifique : celle
d’annoncer l’Évangile pour conscientiser la classe politique et ceux qui sont à
la charge de la chose publique, pour qu’ils assurent toujours mieux le
bien-être et l’épanouissement de leurs peuples. Il importe donc de s’interroger sur
des précautions nécessaires à prendre lorsque les autorités religieuses fréquentent
régulièrement le pouvoir politique : certes, l’autorité religieuse pourrait être proche de la
sphère politique, mais ne pas se sentir "chez lui" parmi les hommes politiques ; familier
avec les corridors du pouvoir, mais sans y être à l’aise. Parce qu’être l’homme
de Dieu, c’est à la fois dire la vérité au pouvoir, et être la voix des sans-voix
et des marginalisés, des victimes qui en dernier ressort ont une place spéciale
dans le royaume de Dieu (Forrestier 1998 : 163).
De même, une autorité ecclésiastique
ne peut accepter n’importe quelle politique. Il ne devrait pas avoir peur de la
discussion et de l’engagement politique. Malheureusement, beaucoup de leaders
chrétiens africains ont opté la "politique de l’autruche". C’est-à-dire,
se taire ou s’inscrire dans la logique proverbiale qui dit : « la bouche qui
mange ne parle pas ». Pourtant, « celui qui ne fait rien ne commet jamais
d’erreurs, mais c’est toute sa vie qui est une erreur » écrit (Varillon 1981) qui
dénonce « le faux apolotisme des chrétiens aux mains pures ».
Pour le théologien allemand Zwingli, «
rendre un culte à Dieu, ce n’est pas rester entre les quatre murs »-- non,
c’est aller dans les rues et y agir. La spiritualité a une dimension nécessairement
publique et politique. L’Évangile ne se limite pas seulement à « Dieu et l’âme
», il concerne aussi ce monde où il faut manifester concrètement le règne de
Dieu.
3.2. Les défis du rapport à la
cité
En Afrique, l’expérience religieuse
fait partie du quotidien dans tous les domaines et à tous les niveaux de
l’africain. Même pour ceux qui n’ont jamais mis pied à l’Église ou à la mosquée,
ils ont toujours eu à prendre à témoin Dieu soit pour clamer leur innocence devant
une juridiction soit pour faire de lui le « Dieu accessoire » quand ils se
sentent en danger.
C’est dire que même si pour le
christianisme, il y a une nette distinction entre le spirituel et le temporel.
Cela ne signifie pas ignorance réciproque ou cassure entre les deux pour l’homme
africain. Il y a, et Péguy l’a lumineusement montré, une coprésence du
spirituel au temporel. Emmanuel Mounier approfondit cette perspective dans un
bref essai intitulé Feu la chrétienté : « Comme l’Église à l’imitation de son
chef est pleinement incarnée, sa mission propre qui n’est pas de ce monde, elle
l’accomplit dans le monde » (Mounier 1950: 79). « Religion de l’universelle
imitation du Christ incarné, le christianisme commande à l’homme une présence active
à tout le temporel. Cette présence concerne l’histoire au premier chef, car il
n’y a pas deux histoires, l’une sainte, l’autre profane. La greffe organique de
l’histoire sainte sur l’histoire profane nous interdit de les considérer comme
deux cours séparées, de les isoler dans deux plans de jugement et dans deux
secteurs d’activité » (Mounier 1950 : 83). Parcourant deux millénaires
d’histoire chrétienne, Mounier montre que le propre de la contribution du chrétien
à la civilisation de son temps, c’est une influence « indirecte, biaisée,
latérale ».
La grande image biblique de l’action
surnaturelle dans le temporel est celle du levain dans la pâte : le ferment du
christianisme s’introduit dans les structures humaines et politiques ; non pour détruire ou
bousculer, mais pour épurer le monde de l’intérieur.
Tout cela interpelle les Églises en
termes de laïcité. Les Églises africaines sont invitées à repenser le concept,
à trouver une laïcité adaptée, à lutter contre toutes les inégalités, contre
les limitations de la liberté en nommant bien leurs fondements à partir de l’héritage
traditionnel. La laïcité adaptée dont on souligne l’importance ici suppose
aussi la responsabilité des Églises. Elle peut être limitée par des motifs
d’ordre public bien définis. En évidence, il est du devoir des Églises
chrétiennes et bien d’autres confessions religieuses d’aider les autorités
politiques à bien gouverner pour la paix et le progrès.
Loin de s’immiscer dans les affaires
qui ne les concerneraient pas, l’Eglise doit s’engager à vivre sa pleine
vocation tout en privilégiant le dialogue Église-État. Car, si les chrétiens veulent
être pris au sérieux comme partenaires pour la construction de la paix dans une
société laïque, ils devront s’interroger sur leurs manières de vivre entre eux
aussi et avec ceux d’autres religions. D’où la question: Que doivent et peuvent
faire les Églises dans l’espace public sans violer la laïcité de l’État, de la
société, sans tomber dans l’autoritarisme outrancier et en respectant la responsabilité
personnelle de leurs membres? À cette question, on donne en général une double
réponse :
3.3. L’Église doit jouer son rôle
prophétique
En premier lieu, on estime que les
Églises ont pour fonction de poser des limites, de rappeler des frontières à ne pas
franchir, de dénoncer l’inacceptable. Elles n’ont ni vocation ni compétence pour élaborer
et proposer un programme politique. Par contre, il leur revient de mettre en
garde contre des dangers et des dérives, de protester contre des excès et des
manquements. Elles doivent signaler ce qui ne va pas (et dans toute société il
y a toujours quantité de choses qui vont mal) et demander qu’on y apporte des remèdes,
même si elles n’ont pas à dicter une solution précise aux problèmes qu’elles signalent.
Elles sortent, par exemple, de leur rôle si elles tracent les lignes d’une politique
de la diplomatie mais elles ont le devoir de protester si on ne traite pas humainement
les étrangers. Il faut refuser que les institutions religieuses exercent directement
ou prennent indirectement le pouvoir. Mais il entre dans leur mission, le cas
échéant quand les débordements se produisent, d’adresser aux dirigeants des « remontrances
».
3.4. L’Église doit susciter des
réflexions sociales
On estime que si l’institution
ecclésiale n’a pas donné des consignes aux fidèles qui en font partie, par
contre, elle doit aider et nourrir leur réflexion, ainsi en organisant des débats,
en publiant des documents qui informent et des études qui permettent d’approfondir
les questions à l’ordre du jour. Les Églises contribuent au sérieux de l’engagement
et des prises de position de leurs membres et des autres citoyens.
Dans nos pays africains, le débat politique
est souvent plus passionnel que réfléchi, plus spectaculaire que profond. On
s’affronte, on cherche à prendre le dessus sur l’autre et on ne se soucie guère
d’élaborer ensemble des solutions. Une des vocations du Christianisme est de favoriser
la pensée, si on ne veut pas qu’elle dégénère en une mêlée confuse et irrationnelle
où on se bat à coup de slogan et où l’image compte plus que la compétence.
Il ne s’agit d’imposer des mots
d’ordre, mais de susciter une réflexion. Ainsi, inscrire la fidélité à
l’Évangile dans le respect de la laïcité, ce sera pour les communautés
chrétiennes à apprendre à prendre parole dans l’espace public, à dialoguer avec
le monde, en ne se substituant pas aux institutions politiques ou sociales nécessaires
à la vie commune. Dans le débat démocratique, ce sera défendre la dignité de
chaque personne, et donc le droit de chacun à user pleinement de sa conscience.
Au regard de ces urgences, il est
temps que les Églises africaines prennent au sérieux les insatisfactions que
formulent, à leur encontre, des gens qui sont, avec leurs faiblesses et leurs
insuffisances, le peuple de Dieu au service duquel l’Église est appelée à
exercer sa noble mission. Si l’Église ne prête pas attention à la détresse
humaine, qu’adviendra-t-il quand d’autres instances prendront prétexte de ses
évidentes faiblesses ?
Conclusion
Au-delà du défi de l’évangélisation
aujourd’hui, un nouvel enjeu se présente pour toutes les Églises africaines,
c’est la prise de parole dans l’espace public. La prise de parole honore les
Églises, les établit dans leur véritable champ d’action et les libère d’éventuelles pressions de l’État ou
des forces de manipulation ou d’instrumentalisation politique. En conséquence,
il est à recommander que les Églises ou les autorités religieuses se gardent de
toutes actions ou attitudes tendant à établir entre elles et l’État des
rapports stratégiques d’intérêt, leur conférant une quelconque forme ou force d’influence,
risquant de provoquer au sein des autres communautés malaises, soupçons et
frustrations.
Ainsi, par la nécessité de prendre la
parole, les Églises devront demeurer vigilantes, refusant de quémander des faveurs,
attitudes qui fragilisent leur liberté d’expression, refusant d’être les caisses de
résonnance d’hommes ou de partis politiques dont elles deviendraient les griots pour des
raisons matérielles, religieuses, ethniques ou par la volonté d’avoir ou d’être une
influence ou une force auprès ou en face de l’État. Elles devront apprendre à
se contenter de ce qui leur revient de droit de par leur reconnaissance objective
et par le rôle qu’elles jouent dans la communauté nationale.
Les Églises devront plus que jamais
s’en tenir à leur mission spirituelle. L’infidélité à cette mission, par l’interférence
d’ambitions politiques inavouées, conduit tôt ou tard à la fanatisation des
Églises et à l’installation de l’intolérance. Elle compromet l’équilibre des
rôles, détruit la cohésion et la confiance sociale, et prépare les conflits.
Cette fidélité à leur mission, que l’État doit encourager et soutenir de
manière objective et impartiale, appelle les Églises et leurs leaders à
repenser de fond en comble leur raison d’être, dans le contexte critique
présent, à entrer en dialogue réflexif, créateur avec et entre elles-mêmes pour
redécouvrir les principes et les conditions de leurs actions afin de contribuer
à la reconstruction de l’unité et de la paix nationales en Afrique (Sinsin Bayo2004
: 25-30).
Prof. Jimi ZACKA, PhD
Référence Bibliographique:
Bertrand, M 2011. L’Eglise dans
l’espace public, Genève/Lyon : Labor et Fides
Forrester, D
1988. Theology and Politics, Oxford: Basil Blackwell.
Francis, [Pope] 2014. Exhortation
apostolique Evangelii Gaudium. Kigali: Palotti Press.
Kä Mana, G 1993. L'Afrique va-t-elle
mourir? Essai d'éthique politique. Paris : Karthala. Mounier, E 2013. Feu la
Chrétienté. Esprit (novembre 2013) : 711- 713.
Sinsin Bayo, J 2003/2004. Laïcité,
dialogue des religions. Débats-Courrier d’Afrique
de l’Ouest. 9 &11 (novembre
2003/janvier 2004): 25-30. Varillon, F 1981. Joie de croire, joie de vivre,
1981
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