On le surnommait Céphas, Petros, en grec roc ou pierre. Fût-ce à cause de son tempérament assez impulsif, son caractère fonceur, sa tendance à diriger les autres, sa capacité de créer une entreprise? Entrepreneur, il l'était. Jusqu'à ce ce que son frère et compagnon professionnel André l'ait mis en contact avec un certain Jésus de Nazareth.
C’est alors que commença un processus de transformation profonde. La pierre
brute qu’était Simon, se faisait tailler sous l’influence du Maître et sous les
coups parfois durs de son enseignement. Au fil des années, il est devenu un
entrepreneur d’un autre style dans le Royaume de Dieu, une pierre taillée pour
un ministère qui a fait de lui l’un des pères fondateurs de l’Église.
Nous les pasteurs, nous avons l’habitude de le montrer en exemple aux
fidèles dans nos Églises - oh combien de messages lui sont-ils consacrés! Dans
cet article, je vous invite à vous placer vous-mêmes devant ce personnage,
comme devant un miroir. Apprenons de lui quelques qualités requises pour ceux
et celles qui exercent un ministère de direction dans l’œuvre de Dieu. Quand je
réfléchis, moi, à son parcours, à son ministère, et surtout au développement de
son caractère, je vois six qualités se profiler.
1. Oser l’inconnu et
prendre des risques, dans la foi
Matthieu nous relate, au chapitre 14 de son évangile, une expérience
vraiment extraordinaire qui en dit long sur la première qualité de Pierre: il
était toujours prêt à oser l’inconnu, quelque chose de nouveau, et à prendre
des risques, dans la foi.
La scène nous flanque la frousse. Une tempête féroce s’est abattue sur le
lac de Tibériade, et ceux qui connaissent ce phénomène particulier à cet
endroit, savent à quel point il peut effrayer même les pêcheurs les plus
expérimentés. Quelques disciples se trouvent dans un bateau, ballotté sur les
vagues. Soudain, ils voient un homme s’approcher, marchant sur les eaux
déchaînées. Certains pensent que c’est un fantôme, mais quand ce personnage
élève sa voix: «faites confiance, je suis, n’ayez pas peur» Pierre n’a plus
aucun doute: c’est le Maître. Et il le dit, ouvertement.
C’est déjà audacieux de confesser sa foi dans une telle situation de visibilité
réduite et d’anxiété totale, mais il va plus loin encore.
Je ne sais pas ce que vous auriez fait, mais moi, j’aurais attendu jusqu’à
ce que Jésus vienne dans mon bateau. C’est très évangélique ça : accueillir
Jésus comme Sauveur et Seigneur. Lui ouvrir la porte. Sans pour autant quitter
les lieux. Comme ça on ne risque pas grand-chose.
Pour Pierre, cela ne suffit pas. Lui s’écrie: «Comme c’est toi, Seigneur,
ordonne-moi de venir à toi».
Beaucoup de traductions portent: «si c’est toi, Seigneur…» Autrement
dit, Pierre n’est pas sûr. Ou pas encore. Est-ce que c’est vraiment le Seigneur
capable de maîtriser la situation effrayante? Qu’il me permette alors de
marcher avec lui sur les eaux. Ce qu’il demande serait une preuve, une
vérification de ce qu’il suppose.
Or, la phrase en grec (e sù eí) peut aussi bien vouloir dire: «comme c’est
toi». Du point de vue grammatical, cette traduction est préférable(1). Elle
donne un sens tout autre. La demande de Pierre n’émane pas d’un doute, mais
d’une certitude. Ce qu’il demande n’a pas pour objectif de vérifier si c’est
vraiment le Seigneur, quitte à constater le contraire, mais de vivre ce que
Jésus est en train de vivre à ce moment précis. Marcher comme Jésus marche.
Partager la dynamique du Royaume de Dieu qui se déploie devant lui.
Bien sûr, ce qu’il demande est inédit. Les hommes ne marchent pas sur les
eaux, surtout pas lors d’une tempête. (Ils ne sont pas créés pour cela,
ajouteront les théologiens). Or, Jésus le fait. Avec Jésus, c’est possible pour
moi aussi, se dit Pierre. Faisant confiance, surmontant sa peur, il ose quelque
chose de nouveau, dans la foi.
En plus, il est prêt à prendre des risques. Et les risques, il y en avait.
Une fois sorti de la barque, il n’était plus sûr de rien. Tout pouvait lui arriver.
Il pouvait se noyer. Malgré cela, il a osé, quitte à vivre un échec, et être la
risée de la bande de disciples.
Si Pierre avait demandé conseil aux autres dans la barque, je ne suis pas
du tout sûr qu’il eût entendu : «oui, vas-y». Et sûrement pas : « bonne idée,
on y va avec toi ». En général, les gens ont peur de l’inconnu. Ils ne sortent
pas de la zone de sécurité. Faut voir d’abord si ça marche pour Pierre. Et
puis, le miracle demandé par Pierre ne semble pas servir à grand-chose. « Faut
pas tenter Dieu, mon frère ».
On le fait pour les autres
Voilà une qualité essentielle d’un vrai leader. Oser l’inconnu. Imaginer
quelque chose de nouveau et oser l’entreprendre. Aller au-delà des chemins
battus. Sortir des ornières. Actionner la foi en Dieu contre vents et marées.
Tester de nouvelles possibilités. Battre en brèche les murs qui s’appellent «on
a toujours fait comme ça».
Si certains disposent de cette qualité déjà dans une certaine mesure en
talent naturel, comme Pierre par exemple, d’autres se l’approprient plutôt par
apprentissage et expérience. Dans tous les cas, elle se développe. Chez Pierre
comme chez nous, elle doit également être sanctifiée. Mise au service du
Seigneur, purifiée d’orgueil et d’irresponsabilité.
Cette qualité, elle est importante, voire décisive. Pourquoi? Parce qu’un
dirigeant n'œuvre pas pour lui-même, voilà ce qui le distingue d’un aventurier,
et d’un égocentriste assoiffé d’acclamations. Il agit pour les autres, confiés
à sa charge. Il cherche l’intérêt de la communauté, le troupeau qui a besoin de
pâturage. C’est un travail vraiment pastoral. En conduisant les autres, il
suivra, non pas automatiquement des modèles de management dernier cri, sortis
de la volonté charnelle des hommes, mais avant tout le Seigneur, berger et
batteur en brèche par excellence (cf. Mi 2.12-13).
Rappelons notre appel
Quand nous avons décidé de servir le Seigneur, d’être pasteur ou
missionnaire, nous avons pris beaucoup de risques. Dans le ministère, rien
n’est gagné. On paye un prix, on fait des sacrifices, renonce à une carrière.
On s’expose aux moqueries des athées, à l’incompréhension totale de la société,
aux plaintes récurrentes des fidèles, et à l’insécurité financière. On risque
d’être envoyé dans les endroits dangereux, dans des Églises difficiles. Sans
parler de la persécution qui est une réalité douloureuse pour beaucoup de nos
«collègues» dans le monde.
C’est vrai, le pire peut arriver aux serviteurs de Dieu. Mais comme Jésus
est là, on peut y aller. Et on y va, effectivement, dès que Jésus l’ordonne.
On connaît la prudence des blessés, les hésitations des gens en échec, le
scepticisme des désabusés, la mélancolie de ceux qui pensent avoir tout vu, les
préjugés des gardiens de la tradition. Ils peuvent être de très mauvais
conseillers.
Bien sûr, être téméraire n’est pas un prétexte pour agir comme un aveugle
débridé qui ne poursuit que ses propres ambitions.
N’empêche qu’un dirigeant dans l’œuvre de Dieu est invité à tracer un
chemin de foi. La foi qui déplace les montagnes. Qui vise l’invisible. Qui
imagine le règne de Dieu dans des situations où il semble être totalement
absent. Qui agit là où même les sages baissent les bras.
Ce n’est pas toujours évident pour un dirigeant. Je vous souhaite toutes
les périodes tranquilles possibles, et le Seigneur nous en accorde, fort
heureusement. Mais la tentation est là d’opter définitivement pour un
fonctionnement moins hasardeux, plus sécurisé. Nous la connaissons tous.
Rappelons notre appel : qu’avons-nous fait en prenant l’engagement d’un
ministère pastoral, missionnaire ou autre sinon d’oser l’inconnu, dans la foi?
Nous étions persuadés que, quelle que soit la situation qui nous attend, le
Seigneur est déjà là, marchant sur les eaux sans se noyer, maître de la situation.
En dépit des risques, et sans calculer les effets collatéraux.
Dans un autre lieu
Ne perdons pas cette qualité. Cultivons-la. Nous en avons besoin tout au
long de notre vie, comme le montre le parcours de Pierre.
Lui a continué à oser l’inédit. Franchir des frontières. Élargir le champ
d’action de l’Évangile.
En Actes 12, par exemple. À peine libéré de son emprisonnement, Pierre
«s’en alla dans un autre lieu» écrit Luc, sèchement (v.17). À première vue, le
récit de Luc donne l’impression que l’apôtre s’éclipse discrètement de la scène
de Jérusalem, et qu’il ne joue plus un rôle important dans le développement de
l’église, sauf encore une fois, lors du concile de Jérusalem (Ac 15).
Désormais, Luc passe de Pierre et la mission auprès des Juifs, à Paul et la
mission auprès des nations, disent les exégètes. Mais moi, je m’intéresse à
Pierre.
Il a quitté l’Église de Jérusalem. Cela devait être une décision difficile
à prendre. Pendant des années, Pierre a exercé un ministère extrêmement
fructueux. Soudainement, un coup de tête, Hérode va assassiner l’apôtre Jacques
et emprisonner Pierre. Après sa libération miraculeuse, il décide de ne pas
rester. Peut-être que les anciens lui ont conseillé de se cacher tant que le
roi Hérode le faisait chercher. Après quoi, il pourrait reprendre son
ministère. La persécution s’annonçait de courte durée. En plus, Pierre et les
autres dirigeants avaient déjà fait face à des situations difficiles. Et puis,
l’Église avait encore besoin de lui. Que deviendrait-elle sans lui ? Les possibilités
d’évangélisation autour de Jérusalem commençaient à s’ouvrir. Bref, il y avait
encore énormément à faire.
Souvent, des pasteurs et des missionnaires, une fois dépassé un certain âge
(au lecteur de constater lequel à peu près), s’accrochent à l’œuvre qu’ils ont
créée, ou aidée à développer. On a tendance à poser ses bagages et de rester,
même si le travail est devenu dur, rébarbatif, pour ne pas dire épuisant. À une
nouvelle perspective qui s’ouvrirait si on levait à nouveau l’ancre pour
prendre le large, on préfère tourner en rond. Certes, la fidélité et la
persévérance sont en soi de bonnes qualités qui sont tout à fait à l’honneur
d’un dirigeant. Mais elles perdent leur sens, à mon avis, quand elles
deviennent des prétextes pour accepter, selon les cas, le calme plat ou la
guerre de tranchées - «je ne quitte pas mon poste, advienne que pourra». Là, on
commence à se sentir indispensable, du moins sur le moment. Et en plus : que
faire d’autre? On n’a pas nourri l’esprit entrepreneur, on est devenu craintif
face à l’inconnu, et des effets collatéraux.
C’est l’âge, dit-on.
On pense ne plus pouvoir apprendre une autre langue. Ne plus pouvoir
s’adapter à une autre culture.
Eh bien, Pierre, quadragénaire, presque quinquagénaire, a osé tout cela. Il
n’a pas attendu jusqu’à ce que la situation se calme pour faire sa réapparition
et reprendre son ministère tant béni. Non, il a laissé tout derrière lui pour
«s’en aller dans un certain lieu».
Comprenne qui pourra; cette phrase sort directement d’Ézéchiel 12.1-3, où
Dieu donne l’ordre au prophète de partir de Jérusalem avec un «équipement de
déporté» vers «un autre lieu», à savoir Babylone. En effet, un peu plus tard,
Pierre va envoyer une lettre depuis «Babylone»(2). Selon certains, ce nom
signifie effectivement la ville de Babylone, d’autres pensent qu’il fait
allusion à Rome. Quoi qu’il en soit, Pierre se lance dans une nouvelle
aventure, si je puis m’exprimer ainsi. Il entame des voyages missionnaires. Il
va servir différentes églises, où il n’a pas de réputation ni de statut,
notamment celle de Corinthe(3), celle d’Antioche - pendant sept ans, selon les
sources anciennes - et d’autres encore. Finalement, il va arriver à Rome pour y
servir l’Église. En 67, il est crucifié, comme le Seigneur l’avait déjà prédit
juste après la résurrection, au bord du lac de Tibériade: «Quand tu seras
vieux, tu étendras tes mains, et un autre te l’attachera et te mènera où tu ne
voudras pas», ce qui fut compris comme étant un indice « de quelle mort Pierre
glorifierait Dieu» (Jn 21.18-19)(4).
Survivants de risques
Pour conduire les autres, un dirigeant doit être en mouvement lui-même,
prenant fait et cause pour le Seigneur. Oser le chemin risqué, pour le bien
d’autrui. À ce propos, j’aimerais citer Klaus Müller, missionnaire allemand et
professeur en missiologie à la faculté de Louvain. Il écrit ceci :
«Dans la mission, il ne s’agit pas tellement d’hommes très forts qui
accomplissent beaucoup, mais plutôt de ce que l’on garde les yeux fixés sur les
objectifs de Dieu, et de ce que l’on se laisse motiver par l’amour du Seigneur
Jésus Christ et par l’amour pour un monde pas encore réconcilié avec Dieu, et
de prendre les risques de la foi. Même ceux qui doutent, sont impliqués dans
l’œuvre de Dieu… La plupart des personnes dont on écrit des biographies, sont
des survivants des risques…Ce ne sont pas seulement les jeunes, d’ailleurs, qui
doivent exercer la foi et qui doivent faire face à leurs limites. Les vieux
doivent également s’entraîner dans le domaine de la foi. Là, il n’y a pas d’intérêt
à tirer d’un passé…Pauvre foi, qui ne veut plus tester ce que Dieu veut encore
accomplir par elle»(5).
Oser dans la foi n’est pas une garantie pour la réussite. Il y aura des
blessures, voire des échecs. Bien souvent, on perd confiance, de peur que l’on
se heurte à nouveau à la même pierre, et on a du mal à motiver les autres. Je
cite à nouveau Klaus Müller :
«C’est risqué de conseiller aux jeunes de prendre des risques, quand on a
échoué. Mais si l’on a échoué, cela ne veut pas dire que les autres ne devraient
plus rien oser. Seulement celui qui est ressuscité des cendres des risques de
sa foi et qui constate que Dieu est vivant, et que la promesse de sa présence
s’applique encore, est capable d’encourager les autres d’oser, eux aussi,
quelque chose de nouveau»(6).
2. Se laisser
«tailler» aux travers des aléas de son ministère
Cet épisode, justement, nous montre une deuxième qualité d’un dirigeant.
Pierre était prêt à se laisser « tailler » aux travers des aléas de son
ministère.
Est-ce que Pierre avait un caractère qui le prédisposait, de façon
naturelle à devenir un apôtre fondateur de l’Église ? Dans la littérature sur
le « leadership », thème "tendance" dans le monde évangélique
aujourd’hui, on affirme souvent qu’il faut avoir un certain profil pour devenir
un « leader », que l’on développera par la suite. Sinon, on ne réussira jamais,
donc ce n’est même pas la peine de se laisser former à cela(7).
Certes, les uns y sont plus aptes que les autres, de par leur personnalité.
Mais je ne crois pas au prédéterminisme en la matière. Regardez par exemple
Pierre. S’il avait des traits de caractère requis pour être un dirigeant, il
avait également pas mal de défauts qui le disqualifiaient. Il avait besoin
d’être taillé, et d’apprendre. Et c’est cela que son Maître a fait, tout au
long de sa vie.
Idem pour nous. Nul n’est déjà apte au ministère de dirigeant de par ses
seuls dons naturels, aussi impressionnants soient-ils. En revanche, personne
n’est condamné à rester sur la touche à cause de ses défauts ou ses péchés,
aussi nombreux soient-ils. Ce qui importe, c'est de se laisser tailler au
travers des aléas de son ministère.
Facteur salutaire
Dans son étude sur la vie des apôtres, William McBirnie décrit le caractère
de Pierre comme suit:
«Pierre était une combinaison rare de courage et de lâcheté, de grande
force et d’instabilité regrettable. Aucun des disciples ne fut si souvent
réprimandé par notre Seigneur comme Pierre, aucun des disciples n’a jamais osé
réprimander notre Seigneur comme Pierre. Et pourtant, au fur et à mesure d’être
sous l’influence de l’exemple et la formation du Christ, le caractère
ouvertement tempétueux fut mis sous contrôle, jusqu’à ce que, finalement, après
la Pentecôte, il devienne la personnification de la fidélité au Christ»(8).
Et d’ajouter un constat de la plus haute importance :
«Il y avait un facteur salutaire dans le caractère de Pierre, c’était
d’être extrêmement sensible au péché»(9).
Dans la nuit pascale, Pierre a échoué. Si Judas a trahi son Maître, Pierre
l’a maudit. Normalement, de telles fautes graves signifient la fin d’un
ministère.
Il en est de même pour nous. Soit on tombe dans le péché. Soit on accumule
les erreurs et les maladresses. Soit on se met toute la communauté à dos par un
comportement autoritaire. Ou bien, tout simplement, on n’arrive plus à rester
fidèle au Seigneur. Nul n’est à l’abri de ces choses-là. Elles amènent des
échecs, parfois même ce que l’on appelle « la mort du ministère ».
Est-ce la fin de l’exercice? Pas forcément. Cela dépend de nous. De ce que
nous reconnaissions le péché et que nous laissions le Seigneur travailler les
sources du problème, dans le plus profond de notre cœur.
Pierre avait cette qualité. C’est ce qui a «sauvé» son ministère.
Pendant cette nuit pascale où il tomba si bas, Jésus l’a regardé, et Pierre
n’a pas fui son regard. Il ne s’est pas durci, il n’a pas rejeté la faute sur
les autres, les circonstances, son éducation, sa jeunesse. Pas de facteurs
atténuants. Non, il a assumé. Et il a pleuré des larmes de remords. Il a pleuré
amèrement.
Cette nuit là, Jésus a vu la sincérité de son cœur, entendu le cri de
quelqu’un qui avait tout perdu. Et il l’a réhabilité en lui posant l’unique
question qui importe quand on vit la mort de son ministère: «Simon, m'aimes tu?»
Dans ces quelques mots, tout est dit.
Mais attention. Si Pierre fut réhabilité, il n’a pas tout simplement repris
son ministère. Désormais, il servait le Seigneur autrement. Plus humblement.
Si un dirigeant n’arrive pas à avouer ses méfaits ni à en assumer les
conséquences, si la repentance lui est trop difficile, trop humiliante, comment
saura-t-il conduire les autres dans ces domaines-là?
3. Savoir changer
d’opinion
Quand on dirige une Église ou une œuvre, on s’expose à des critiques.
Quelqu’un à qui cela fait peur, ferait mieux de chercher un autre métier pour
glorifier Dieu. Parfois, les critiques sont fondées, ce qui arrive d’ailleurs
plus souvent que l’on ne pense. C’est là où l’on doit avoir la largesse de se
mettre en question, de demander pardon si nécessaire. Je viens d’en parler.
Mais parfois, les critiques ne sont pas vraiment justifiées, ce qui arrive
d’ailleurs moins souvent que l’on ne croit. Alors, que faire ?
En Matthieu 16, Pierre fait une confession de foi audacieuse, mais il est
tout de suite repris par Jésus quand il conteste l’idée que le Messie devrait
mourir. Ce qui m’intéresse maintenant, ce ne sont pas les aspects théologiques
suscités par le différend qui l’opposait au Seigneur, mais sa capacité de
changer d’opinion, quoi que les autres puissent en penser. De toute évidence,
il avait du mal. Ce n’est pas chose facile pour quelqu’un qui est à la tête du
troupeau, et qui vient de définir la doctrine christologique de toute la
communauté de disciples, de revenir sur ses propos et d’avouer: j’ai mal
compris.
Et pourtant, c’était inéluctable, et bien nécessaire.
Pierre a dû revoir sa copie. Après la résurrection, il l’a compris et il le
dit ouvertement, le jour de Pentecôte: c’est selon le dessein arrêté et selon
la prescience de Dieu que le Christ fut livré et crucifié (Ac 2.23).
Attends, lorsque Pierre fut repris par le Seigneur, allez-vous me dire, il
était encore en formation. C’est normal pour un étudiant en théologie de revoir
des opinions mal fondées qu’il s’est faites au début de sa vie chrétienne.
C’est vrai. En formation, on s’ouvre à d’autres opinions, on étudie en
profondeur, on apprend à toujours apprendre. Or, cela ne doit pas s’arrêter là
mais devenir une attitude pour le reste de la vie, cette ouverture d’esprit,
cette humilité académique. Malheureusement, on constate trop souvent le
contraire. Une fois pasteur, une fois responsable des études bibliques, on a
tendance à redire ce que l’on a appris, répéter ses opinions. Et de camper sur
sa position quand on est confronté à d’autres points de vue.
Ceci n’est toutefois pas une qualité qui fera de nous de bons dirigeants.
Ceux qui ont du mal à revenir sur leurs opinions, deviennent inflexibles,
autoritaires, difficiles à aborder. Pas difficile d’en trouver des exemples
concrets.
Ainsi va la culture française. Plus on monte en grade, plus on est sûr de
soi. Plus on a des responsabilités, moins on affiche ses incertitudes, ses
doutes. Un patron sait ce qu’il fait et où il va, il est en tout cas censé le
savoir, puisque c’est lui qui donne des ordres.
Se remettre en question et revenir sur ses opinions, dans la culture
française, c’est fatal.
Mais pour un dirigeant dans l’œuvre du Seigneur, c’est vital.
Sortir de la barque
En Actes 10, nous voyons Pierre, l’apôtre accompli, le leader incontestable
de l’Église de Jérusalem, celui dont l’ombre suffisait déjà pour que les
malades soient guéris, ce Roc dans l’œuvre de Dieu, changer publiquement d’avis
sur une question très importante à l’époque : un Juif peut-il être fidèle aux
commandements de Dieu et entrer dans la maison impure d’un païen, lui serrer la
main impure, et partager le repas impur avec des gens impurs?
Pierre ne l’avait jamais fait depuis le jour de Pentecôte, plusieurs années
en arrière déjà. Il fallait une vision et une voix du ciel pour que l’homme qui
avait marché sur les eaux, sorte de sa barque juive et se lance dans les eaux
troubles de la culture païenne d’un militaire gradé romain, etc. Vous
connaissez la suite de l’histoire.
Pierre a eu l’audace de le faire. Après cela, il s’est défendu face aux
critiques auxquelles il pouvait s’attendre. Actes 11 est un bel exemple de ce
qu’un dirigeant puisse se remettre en question et se montrer prêt à changer
d’opinion. En tant que dirigeants, nous allons certainement nous trouver dans
des circonstances où telle démarche s’impose, selon que le Seigneur nous montre
des choses auxquelles nous n’avions pas encore pensé. Sinon, comment
voulons-nous que ceux qui sont confiés à notre conduite, reviennent sur leurs
erreurs à eux?
Avouer un tort, revenir sur une opinion qui s’est avérée erronée, dire que
l’on ne comprend pas encore tout à fait un certain point, ce n’est pas une
défaite. Pas un signe de faiblesse. C’est une qualité d’un dirigeant dans
l’œuvre du Seigneur, et tout à fait à son honneur.
4. Comment gérer la
diversité? Le "Non prophétique" et le "Oui pastoral"
En Galates 2, Paul décrit un moment délicat, pour ne pas dire douloureux
dans l’Église d’Antioche ; la confrontation entre lui et les apôtres Pierre et
Barnabé. Vous connaissez l’histoire. Dans un premier temps, Pierre mange avec
les croyants non Juifs, mais quand une délégation de l’Église de Jérusalem
vient voir ce qui se passe, Pierre change de compagnie, rejoignant les croyants
Juifs. Alors, Paul s’indigne. Selon lui, c’est condamnable, et il le dit sans
mâcher ses mots. «Tout apôtre que tu es, Pierre, tu agis comme un hypocrite qui
a peur du jugement des Juifs. En plus, tu veux imposer la tradition juive aux païens».
Moi, j’ai longtemps pensé que ce fut là un moment de faiblesse de la part
de Pierre. On la lui pardonne volontiers, sachant que nous sommes tous faits de
la même pâte que lui.
Une autre lecture ?
Mais une lecture plus attentive au contexte culturel de cet épisode, m’a
amené à voir les choses un peu différemment.
D’abord, on n’a que l’interprétation de Paul. Au moment de rédiger sa
lettre aux Galates, il est persuadé que le comportement de Pierre revient à
imposer un style de vie judaïque à tous les chrétiens. Et ça, c’est
condamnable, effectivement. Mais était-ce vraiment l’intention de Pierre de
«judaïser» les païens? Quel est le point de vue de Pierre, et de Barnabé
d’ailleurs? Dans le NT, ils ne s’expliquent pas. En tout cas pas explicitement.
Deuxièmement, il faut savoir comment l’Église d'Antioche s’est développée
pour comprendre ce qui s’est passé. Fondée par des réfugiés Juifs venus de la
Judée, cette Église va accueillir des Juifs de la Diaspora, et plus tard aussi
des non-Juifs. Aujourd’hui on dirait qu’elle était devenue multiculturelle.
Elle était le champ de travail de Paul. Son enseignement avait ceci de
particulier, qu’il ne demandait pas aux Gentils de suivre toutes les coutumes
juives basées sur la Loi de Moïse. En revanche, les croyants Juifs pouvaient
les suivre, ce qu’ils faisaient, en effet. Donc à une diversité culturelle
s’est ajoutée une diversité théologique.
Probablement, les deux principaux groupes se réunissaient séparément pour
manger. C’est ce que Galates 2.12 laisse penser. Peut-être dans différentes
maisons. C’est à cause, justement, des règles alimentaires et de purification,
observées par les croyants Juifs, ou la plupart d’entre eux, mais non pas par
les autres.
Dans l’exégèse, il est coutumier de rapprocher cette situation du concile
de Jérusalem dont Actes 15 nous donne le résumé. La question qui préoccupait le
concile était de savoir si les Gentils dans l’Église seraient obligés ou non de
pratiquer toutes les lois de Moïse dans la même mesure que les croyants Juifs. On
connaît la décision. À Antioche, il y avait certainement un certain nombre de
fidèles qui essayaient de «judaïser» les païens, puisque la décision du concile
lui fut communiquée spécialement par missive «apostolique».
Or, la question est de savoir, si Pierre (et Barnabé) se sont rangés à
cette position, eux aussi. Paul en était persuadé, en effet, d’où sa réaction
véhémente. Mais il est possible qu’il y ait eu là un malheureux malentendu
entre lui et Pierre. Une façon différente de gérer la diversité dans l’Église.
Regardons de plus près. Le concile n’a pas traité de la situation décrite
en Galates 2.12: différents groupes dans l’Église ont leurs repas séparés. Dans
l’Église d’Antioche, ils avaient le droit d’exprimer leur spécificité
culturelle, aussi dans le domaine important de la communion de table. Tant
qu’ils n’imposaient pas leur façon de faire aux autres, la décision d’Actes 15
ne s’appliquait pas à eux. Effectivement, d’après ce que Paul rapporte, Pierre
ne semble pas avoir obligé les païens à le suivre et à rejoindre les Juifs dans
l’Église. Mais Paul voyait le danger: le chemin que vous empruntez est mauvais,
puisqu’il va certainement aboutir à cela.
Troisièmement, j’ai du mal à comprendre comment Pierre, qui a défendu, lors
du concile, la liberté prônée par Paul, puisse vraiment «judaïser» peu avant ou
peu après(10). D’autant plus que c’est lui qui était le premier à entrer dans
une maison païenne, celle de Corneille, pour y communiquer l’évangile et vivre
un moment de fraternité (Ac 10).
Un jour, Pierre arrive dans cette Église. Il est nouveau, tandis que Paul,
lui, est l’un des «leaders». C’est lui qui exerce l’autorité, non pas Pierre.
Dans un premier temps, Pierre rejoint les convertis non Juifs. Ainsi
soutient-il la mission parmi les Gentils et leur inclusion dans l’Église. Mais
il semble y avoir une sorte d'accord qui stipule que Pierre devrait s’occuper
de l’évangélisation d’Israël et des croyants Juifs, tandis que Paul devrait
s’occuper de la mission auprès des autres peuples (Ga 2.8-9). Une délégation de
chez Jaques arrive. Pourquoi? Théoriquement, il est possible que les dirigeants
veuillent rappeler Paul et Barnabé à l’ordre. C’est ce que l’on lit le plus
souvent dans les commentaires.
Et si leur «cible» n’était pas Paul mais Pierre? C’est bien aussi possible.
Moi, je suis enclin à le penser. À Jérusalem, on voyait d’un mauvais œil le
comportement de Pierre à Antioche, dans la mesure où ceci pouvait être
interprété comme une négligence de sa responsabilité vis-à-vis des Juifs. Comme
une prise de position en faveur de la lignée théologique de Paul.
Conscient de leur pensée, Pierre quitte les repas des croyants non-Juifs
pour manger désormais avec les croyants Juifs. Selon Paul, il agit par peur. Il
«esquivait» les délégués.
Mais de quoi, Pierre, réputé pour son audace, pourrait-il bien avoir peur?
Selon Carsten Thiede, il avait peur d’une confrontation qui entraînerait la
scission de l’Église en deux Églises. Notons, au passage, que la solution
protestante évangélique aux tensions suscitées par la diversité culturelle,
théologique et liturgique, à savoir la création d’une variété toujours
croissante de dénominations et d’Églises autonomes, n’existait pas encore à
l’époque de la confrontation à Antioche. Là, il fallait à tout prix trouver
pour tous un modus vivendi. Sinon, un schisme semblait inévitable.
Pour éviter un tel drame, Pierre fit un geste de conciliation. Il voulait
montrer que dans une Église aussi diverse que celle d’Antioche, on peut manger
avec les Juifs en respectant leurs coutumes, et avec les Gentils sans s’en
tenir aux règles du cachrout. Histoire de donner aux responsables
un exemple de direction flexible(11).
Aux yeux de Paul, c’est une manière de ménager la chèvre et le chou. Un
compromis face aux exigences des « judaïsants », et donc une entorse à la
liberté en Christ. Si Paul défend bec et ongles la position théologique prise
par le conseil de Jérusalem, Pierre semble se soucier davantage des
conséquences pratiques.
Pierre, lui, se trouve pris en tenaille entre deux positions. J’imagine, je
sais très bien que ce n’est pas écrit explicitement, mais c’est ma lecture de
ce qui nous est rapporté, que Pierre avait peur que les délégués de Jérusalem
et Paul restent aussi intransigeants les uns comme les autres. Peur que les uns
ne fassent qu’enfermer le courant juif dans un mode de vie strictement judaïque
et de l’isoler du reste de l’Église. Et peur que Paul, lui, ne pousse trop loin
le bouchon de la liberté en Christ.
Un « clash » entre deux visions de « leadership »
Si cette lecture est juste, on a affaire à un «clash» entre deux visions de
«leadership». Celle du prophète et celle du berger.
Je le pense, effectivement, d’autant plus que ce n’est pas Paul qui reste
et Pierre qui quitte l’Église, mais l’inverse. Paul part en mission et ne
reviendra jamais, sauf pour une escale très brève («quelque temps»), quand il
est en route vers Jérusalem (Ac 18.23). Je ne vais pas jusqu’à dire avec James
Dunn que «finalement, c’est Pierre qui a gagné»(12), mais j’ai l’impression que
l’approche de Pierre n’a pas été écartée du terrain. Bien au contraire.
Dans un premier temps, Pierre est dénoncé par Paul pour son comportement
taxé trop flexible. Par la suite, ce dernier semble toutefois avoir adopté,
lui-aussi une position plus conciliaire, plus flexible, plus «pastorale».
Quelques années plus tard, il écrit aux Corinthiens: «bien que je sois libre à
l’égard de tous, je me fais le serviteur de tous, afin de gagner le plus grand
nombre. Avec les Juifs j’ai été comme Juif… avec ceux qui sont sans loi, comme
sans loi, et pourtant je ne suis pas moi-même sans la loi de Dieu» (1 Co
9.19-23). Il est intéressant de lire Tertullien qui évoque, justement, ce
passage pour «prendre la défense de Pierre»(13).
Carsten Thiede en arrive à la conclusion que «le style de leadership de
Pierre s’est avéré acceptable pour les chrétiens à Antioche. Et Paul l’a
appris, lui aussi, ce qui est la marque de sa grandeur»(14).
Si ma lecture de cet épisode est juste, et si on a affaire à deux visions
de leadership, j’aimerais ajouter que les approches de Paul et de Pierre ne
s’excluent pas mutuellement. En tout cas, pas toujours. Le «non prophétique»
est indispensable et fort nécessaire, mais le plus souvent il a besoin d’être
complété par un «oui pastoral». Et inversement. Un dirigeant doit savoir
prononcer les deux, et savoir quand il faut mettre l’accent sur l’un plutôt que
sur l’autre.
5. Savoir apprécier le
talent des autres
Une cinquième qualité que Pierre a cultivée est son appréciation des
personnes talentueuses, plus compétentes que lui dans certains domaines, plus
douées par le Saint-Esprit à certains égards. Souvent, un dirigeant à peur de
ceux qui pourraient lui voler la vedette. De telles personnes constituent une
menace à son autorité. Il a du mal à leur laisser la place dans l’Église,
puisqu’il sait très bien qu’il ne peut pas les traiter comme des auxiliaires,
des aides, des porteurs de ses valises.
Voilà un grand problème dans le «leadership» aujourd’hui. Sous l’ombre d’un
grand chêne rien ne pousse, dit-on. Sous l’ombre d’un pasteur qui se veut grand
non plus.
C’est pourquoi on voit des gens compétents quitter l’assemblée, souvent
après une ou plusieurs confrontations. Ceux qui trouvent telle assemblée trop
étroite, et le pasteur trop ceci et trop peu cela, vont ailleurs, rejoindre une
autre Église où l’histoire risque fort de se répéter, tôt ou tard, et ainsi de
suite. Ou ils créent une nouvelle Église dont ils peuvent être le chef
incontesté. Ou bien, ils rejoignent une œuvre. Autre option : partir en
mission. Ou encore: se concentrer sur la carrière professionnelle et se
désengager de l’œuvre du Seigneur. On ne compte pas ceux qui s’immobilisent «dans
la nature», après avoir été rebutés par les traditions d’une Église. C’est un
véritable drame.
Pierre était un grand homme. Un véritable révérend. On lui donnerait le
titre de docteur «honoris causa». Mais il ne vivait pas son statut comme
quelque chose à lui. Quelque chose qu’il fallait défendre, mettre en sécurité,
et affirmer à tout bout de champ. Non, son ministère était pour lui une grâce.
Comment pourrait-il en être autrement, après sa déconfiture pendant la nuit
pascale, et après être gracié par le Seigneur ressuscité?
Regardez comment il donne l’honneur aux autres dans ses épîtres.
Au lieu de décrire lui-même le message qu’il annonçait et l’enseignement
qu’il dispensait, il l’a laissé à Marc. Sans doute parce que Marc était
meilleur écrivain que lui. Par conséquent, c’est Marc l’auteur de l’évangile de
Pierre(15).
Au lieu de formuler son testament spirituel lui-même, il laisse la place à
Sylvain, sans doute parce qu’il avait une belle plume. C’est pourquoi, Sylvain
a rédigé l’épître qui porte le nom de Pierre, et Pierre tient à le remarquer (1
P 5.12).
Et écoutez bien les paroles bienveillantes qu’il consacre à Paul, celui qui
n’avait pourtant pas été très tendre avec lui dans l’Église d’Antioche. Paul
l’a ouvertement traité d’hypocrite (Ga 2). De son côté, Pierre n’a pas médité
la revanche. Au contraire, il a reconnu que sur le plan théologique, Paul avait
une meilleure connaissance de certaines choses. Et il rend hommage à la sagesse
qui a été donnée, non pas à lui-même, mais à Paul (2 P 3.15).
Un dirigeant qui se sent menacé par des collaborateurs plus compétents que
lui dans certains domaines, va jouer son autorité et étouffer le potentiel. Il
va finir par être entouré de médiocrité.
Un vrai dirigeant connaît ses limites et sait apprécier le capital humain
dont il est entouré. Sous sa direction, les talents des autres peuvent éclore.
Ceux qui ont envie de servir selon leurs qualités seront encouragés.
6. Axer le ministère sur le caractère
Pour la sixième et dernière qualité que je déduis du parcours de Pierre, je
peux être très bref, tellement elle parle de soi. Dans ses épîtres, Pierre
transmet ce qu’il a appris au fil des années. En matière de ministère pastoral
ou autre, il souligne que le dirigeant doit servir de bon cœur, et qu’il doit
diriger en étant un modèle du troupeau (1 P 5.1-4). Un modèle de quoi? Dans la
seconde épître, il s’explique: un modèle de croissance spirituelle, dont
l’aspect le plus important est l’amour – écho de la question de Jésus au bord
du lac: Pierre, m’aimes-tu? Et sa mission: Fais paître mes brebis. Tout cela
revient à dire que le ministère, pour porter du fruit qui demeure, doit être
axé sur le caractère.
En fin de compte, les gens que nous servons dans l’Église et à qui nous
communiquons l’Évangile en dehors de l’Église, de près ou de loin, ne
retiendront que très peu de ce que nous avons dit ou fait. Mais ils se
souviendront souvent, presque toujours, de la manière dont nous l’avons dit ou
fait. C’est le caractère, exprimé au travers du ministère, qui laisse l’impression
la plus durable. Pour le meilleur ou pour le pire.
Pierre nous exhorte: «faites tous vos efforts pour joindre à votre foi la
vertu, la connaissance, la maîtrise de soi, la persévérance, la piété, la
fraternité et l’amour. Elles ne vous laisseront pas sans activité ni sans
fruit…» (2 P 1.4-8).
Je cite, enfin, encore une fois, Klaus Müller:
«Ce qui importe, ce n’est pas ce que nous pensons faire pour Dieu, mais ce
que Dieu opère en nous et au travers de nous. C’est cela qui demeure en
éternité. Au lieu de nous construire des monuments à notre mémoire, nous devons
construire le Royaume de Dieu. Et quand nous ne sommes plus là, d’autres vont
poursuivre ce travail»(16).
Bibliographie
(1) Cf. Blass/Debrunner/Rehkopff,
Grammatik des neutestamentlichen Griechisch, Göttingen (Vandenhoeck &
Ruprecht), 1984, § 360 et 372. Selon les auteurs, e? suivi d’un indicatif
présent signifie, en règle générale une réalité. On doit le traduire par
«quand» ou «par conséquent» (implication de ce qui précède). Très souvent, le
sens est proche de la conjonction causale «comme» (p.302, § 372, point 1).
(2) Sa première (1 Pi 5.13). Si la date de cette lettre est incertaine, elle doit se situer, de toute évidence entre le départ de Pierre de Jérusalem en 42 apr. J.C. et peu avant sa mort à Rome en 67 apr. J.C.
(3) Ce qui explique l’existence d’un courant « de Céphas » dans cette église, 1 Co 1.12.
(4) Nombreuses sont les reconstructions du parcours de Pierre après qu’il a « quitté » le récit des Actes. Je me suis référé, notamment à Oscar Cullmann, Petrus : Jünger - Apostel - Märtyrer, Munich (Siebenstern), 1960, et, plus récent, Carsten Thiede, Simon Peter : From Galilee to Rome, Exeter (Paternoster), 198
(5) Klaus Müller, "Glaube, Risiken und Nebenwirkungen", Evangelikale Missiologie, 2006, n°1, p.3.
(6) Ibid., p.5.
(7) Ce genre de propos, on le trouve, par exemple, chez John G. Maxwell, auteur évangélique, dans son ouvrage assez connu, Developing the Leader Within You, Nashville (Thomas Nelson), 1993.
(8) William Steuart McBirnie, The Search for the Twelve Apostles, Wheaton (Tyndale), 1972, p.51.
(9) Ibid., p.51.
(10) Quant à la question si l’épisode en Galates 2 ait eu lieu avant ou après ce concile, les spécialistes avancent différentes réponses, mais cela ne change pas grand-chose à mon interrogation.
(11) Carsten Thiede, op. cit., p.166s.
(12) James G. Dunn, Unity and Diversity in the New Testament, London (SCM), 1977, p.254.
(13) I will put in a defence, as it were, for Peter, to the effect that even Paul said that he was “made all things to all men - to the Jews a Jew,” to those who were not Jews as one who was not a Jew - “that he might gain all.” Tertullien, Adversus Marcionem, 1.23. Source de la citation : Ante Nicene Fathers, Grand Rapids (Eerdmans), 1975, Vol. III, tome II.
(14) Carsten Thiede, op. cit., p.166.
(15) Toutes les sources post-apostoliques s’accordent à dire que l’évangile de Marc constitue en fait le message et l’enseignement de Pierre. Marc écrit ce que Pierre lui a transmis. Mais il le fait avec une certaine liberté de plume, selon sa propre composition.
(16) Klaus Müller, op. cit., p.4.
(2) Sa première (1 Pi 5.13). Si la date de cette lettre est incertaine, elle doit se situer, de toute évidence entre le départ de Pierre de Jérusalem en 42 apr. J.C. et peu avant sa mort à Rome en 67 apr. J.C.
(3) Ce qui explique l’existence d’un courant « de Céphas » dans cette église, 1 Co 1.12.
(4) Nombreuses sont les reconstructions du parcours de Pierre après qu’il a « quitté » le récit des Actes. Je me suis référé, notamment à Oscar Cullmann, Petrus : Jünger - Apostel - Märtyrer, Munich (Siebenstern), 1960, et, plus récent, Carsten Thiede, Simon Peter : From Galilee to Rome, Exeter (Paternoster), 198
(5) Klaus Müller, "Glaube, Risiken und Nebenwirkungen", Evangelikale Missiologie, 2006, n°1, p.3.
(6) Ibid., p.5.
(7) Ce genre de propos, on le trouve, par exemple, chez John G. Maxwell, auteur évangélique, dans son ouvrage assez connu, Developing the Leader Within You, Nashville (Thomas Nelson), 1993.
(8) William Steuart McBirnie, The Search for the Twelve Apostles, Wheaton (Tyndale), 1972, p.51.
(9) Ibid., p.51.
(10) Quant à la question si l’épisode en Galates 2 ait eu lieu avant ou après ce concile, les spécialistes avancent différentes réponses, mais cela ne change pas grand-chose à mon interrogation.
(11) Carsten Thiede, op. cit., p.166s.
(12) James G. Dunn, Unity and Diversity in the New Testament, London (SCM), 1977, p.254.
(13) I will put in a defence, as it were, for Peter, to the effect that even Paul said that he was “made all things to all men - to the Jews a Jew,” to those who were not Jews as one who was not a Jew - “that he might gain all.” Tertullien, Adversus Marcionem, 1.23. Source de la citation : Ante Nicene Fathers, Grand Rapids (Eerdmans), 1975, Vol. III, tome II.
(14) Carsten Thiede, op. cit., p.166.
(15) Toutes les sources post-apostoliques s’accordent à dire que l’évangile de Marc constitue en fait le message et l’enseignement de Pierre. Marc écrit ce que Pierre lui a transmis. Mais il le fait avec une certaine liberté de plume, selon sa propre composition.
(16) Klaus Müller, op. cit., p.4.
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