jeudi 7 janvier 2016

LES QUALITES D'UN DIRIGEANT CHRETIEN, A L'EXEMPLE DE L’APÔTRE PIERRE



On le surnommait Céphas, Petros, en grec roc ou pierre. Fût-ce à cause de son tempérament assez impulsif, son caractère fonceur, sa tendance à diriger les autres, sa capacité de créer une entreprise? Entrepreneur, il l'était. Jusqu'à ce ce que son frère et compagnon professionnel André l'ait mis en contact avec un certain Jésus de Nazareth.
C’est alors que commença un processus de transformation profonde. La pierre brute qu’était Simon, se faisait tailler sous l’influence du Maître et sous les coups parfois durs de son enseignement. Au fil des années, il est devenu un entrepreneur d’un autre style dans le Royaume de Dieu, une pierre taillée pour un ministère qui a fait de lui l’un des pères fondateurs de l’Église.
Nous les pasteurs, nous avons l’habitude de le montrer en exemple aux fidèles dans nos Églises - oh combien de messages lui sont-ils consacrés! Dans cet article, je vous invite à vous placer vous-mêmes devant ce personnage, comme devant un miroir. Apprenons de lui quelques qualités requises pour ceux et celles qui exercent un ministère de direction dans l’œuvre de Dieu. Quand je réfléchis, moi, à son parcours, à son ministère, et surtout au développement de son caractère, je vois six qualités se profiler.
1. Oser l’inconnu et prendre des risques, dans la foi

Matthieu nous relate, au chapitre 14 de son évangile, une expérience vraiment extraordinaire qui en dit long sur la première qualité de Pierre: il était toujours prêt à oser l’inconnu, quelque chose de nouveau, et à prendre des risques, dans la foi.
La scène nous flanque la frousse. Une tempête féroce s’est abattue sur le lac de Tibériade, et ceux qui connaissent ce phénomène particulier à cet endroit, savent à quel point il peut effrayer même les pêcheurs les plus expérimentés. Quelques disciples se trouvent dans un bateau, ballotté sur les vagues. Soudain, ils voient un homme s’approcher, marchant sur les eaux déchaînées. Certains pensent que c’est un fantôme, mais quand ce personnage élève sa voix: «faites confiance, je suis, n’ayez pas peur» Pierre n’a plus aucun doute: c’est le Maître. Et il le dit, ouvertement.
C’est déjà audacieux de confesser sa foi dans une telle situation de visibilité réduite et d’anxiété totale, mais il va plus loin encore.
Je ne sais pas ce que vous auriez fait, mais moi, j’aurais attendu jusqu’à ce que Jésus vienne dans mon bateau. C’est très évangélique ça : accueillir Jésus comme Sauveur et Seigneur. Lui ouvrir la porte. Sans pour autant quitter les lieux. Comme ça on ne risque pas grand-chose.
Pour Pierre, cela ne suffit pas. Lui s’écrie: «Comme c’est toi, Seigneur, ordonne-moi de venir à toi».
Beaucoup de traductions portent: «si c’est toi, Seigneur…» Autrement dit, Pierre n’est pas sûr. Ou pas encore. Est-ce que c’est vraiment le Seigneur capable de maîtriser la situation effrayante? Qu’il me permette alors de marcher avec lui sur les eaux. Ce qu’il demande serait une preuve, une vérification de ce qu’il suppose.
Or, la phrase en grec (e sù eí) peut aussi bien vouloir dire: «comme c’est toi». Du point de vue grammatical, cette traduction est préférable(1). Elle donne un sens tout autre. La demande de Pierre n’émane pas d’un doute, mais d’une certitude. Ce qu’il demande n’a pas pour objectif de vérifier si c’est vraiment le Seigneur, quitte à constater le contraire, mais de vivre ce que Jésus est en train de vivre à ce moment précis. Marcher comme Jésus marche. Partager la dynamique du Royaume de Dieu qui se déploie devant lui.
Bien sûr, ce qu’il demande est inédit. Les hommes ne marchent pas sur les eaux, surtout pas lors d’une tempête. (Ils ne sont pas créés pour cela, ajouteront les théologiens). Or, Jésus le fait. Avec Jésus, c’est possible pour moi aussi, se dit Pierre. Faisant confiance, surmontant sa peur, il ose quelque chose de nouveau, dans la foi.
En plus, il est prêt à prendre des risques. Et les risques, il y en avait. Une fois sorti de la barque, il n’était plus sûr de rien. Tout pouvait lui arriver. Il pouvait se noyer. Malgré cela, il a osé, quitte à vivre un échec, et être la risée de la bande de disciples.
Si Pierre avait demandé conseil aux autres dans la barque, je ne suis pas du tout sûr qu’il eût entendu : «oui, vas-y». Et sûrement pas : « bonne idée, on y va avec toi ». En général, les gens ont peur de l’inconnu. Ils ne sortent pas de la zone de sécurité. Faut voir d’abord si ça marche pour Pierre. Et puis, le miracle demandé par Pierre ne semble pas servir à grand-chose. « Faut pas tenter Dieu, mon frère ».

On le fait pour les autres
Voilà une qualité essentielle d’un vrai leader. Oser l’inconnu. Imaginer quelque chose de nouveau et oser l’entreprendre. Aller au-delà des chemins battus. Sortir des ornières. Actionner la foi en Dieu contre vents et marées. Tester de nouvelles possibilités. Battre en brèche les murs qui s’appellent «on a toujours fait comme ça».
Si certains disposent de cette qualité déjà dans une certaine mesure en talent naturel, comme Pierre par exemple, d’autres se l’approprient plutôt par apprentissage et expérience. Dans tous les cas, elle se développe. Chez Pierre comme chez nous, elle doit également être sanctifiée. Mise au service du Seigneur, purifiée d’orgueil et d’irresponsabilité.
Cette qualité, elle est importante, voire décisive. Pourquoi? Parce qu’un dirigeant n'œuvre pas pour lui-même, voilà ce qui le distingue d’un aventurier, et d’un égocentriste assoiffé d’acclamations. Il agit pour les autres, confiés à sa charge. Il cherche l’intérêt de la communauté, le troupeau qui a besoin de pâturage. C’est un travail vraiment pastoral. En conduisant les autres, il suivra, non pas automatiquement des modèles de management dernier cri, sortis de la volonté charnelle des hommes, mais avant tout le Seigneur, berger et batteur en brèche par excellence (cf. Mi 2.12-13).
Rappelons notre appel
Quand nous avons décidé de servir le Seigneur, d’être pasteur ou missionnaire, nous avons pris beaucoup de risques. Dans le ministère, rien n’est gagné. On paye un prix, on fait des sacrifices, renonce à une carrière. On s’expose aux moqueries des athées, à l’incompréhension totale de la société, aux plaintes récurrentes des fidèles, et à l’insécurité financière. On risque d’être envoyé dans les endroits dangereux, dans des Églises difficiles. Sans parler de la persécution qui est une réalité douloureuse pour beaucoup de nos «collègues» dans le monde.
C’est vrai, le pire peut arriver aux serviteurs de Dieu. Mais comme Jésus est là, on peut y aller. Et on y va, effectivement, dès que Jésus l’ordonne.
On connaît la prudence des blessés, les hésitations des gens en échec, le scepticisme des désabusés, la mélancolie de ceux qui pensent avoir tout vu, les préjugés des gardiens de la tradition. Ils peuvent être de très mauvais conseillers.
Bien sûr, être téméraire n’est pas un prétexte pour agir comme un aveugle débridé qui ne poursuit que ses propres ambitions.
N’empêche qu’un dirigeant dans l’œuvre de Dieu est invité à tracer un chemin de foi. La foi qui déplace les montagnes. Qui vise l’invisible. Qui imagine le règne de Dieu dans des situations où il semble être totalement absent. Qui agit là où même les sages baissent les bras.
Ce n’est pas toujours évident pour un dirigeant. Je vous souhaite toutes les périodes tranquilles possibles, et le Seigneur nous en accorde, fort heureusement. Mais la tentation est là d’opter définitivement pour un fonctionnement moins hasardeux, plus sécurisé. Nous la connaissons tous.
Rappelons notre appel : qu’avons-nous fait en prenant l’engagement d’un ministère pastoral, missionnaire ou autre sinon d’oser l’inconnu, dans la foi? Nous étions persuadés que, quelle que soit la situation qui nous attend, le Seigneur est déjà là, marchant sur les eaux sans se noyer, maître de la situation. En dépit des risques, et sans calculer les effets collatéraux.
Dans un autre lieu
Ne perdons pas cette qualité. Cultivons-la. Nous en avons besoin tout au long de notre vie, comme le montre le parcours de Pierre.
Lui a continué à oser l’inédit. Franchir des frontières. Élargir le champ d’action de l’Évangile.
En Actes 12, par exemple. À peine libéré de son emprisonnement, Pierre «s’en alla dans un autre lieu» écrit Luc, sèchement (v.17). À première vue, le récit de Luc donne l’impression que l’apôtre s’éclipse discrètement de la scène de Jérusalem, et qu’il ne joue plus un rôle important dans le développement de l’église, sauf encore une fois, lors du concile de Jérusalem (Ac 15).
Désormais, Luc passe de Pierre et la mission auprès des Juifs, à Paul et la mission auprès des nations, disent les exégètes. Mais moi, je m’intéresse à Pierre.
Il a quitté l’Église de Jérusalem. Cela devait être une décision difficile à prendre. Pendant des années, Pierre a exercé un ministère extrêmement fructueux. Soudainement, un coup de tête, Hérode va assassiner l’apôtre Jacques et emprisonner Pierre. Après sa libération miraculeuse, il décide de ne pas rester. Peut-être que les anciens lui ont conseillé de se cacher tant que le roi Hérode le faisait chercher. Après quoi, il pourrait reprendre son ministère. La persécution s’annonçait de courte durée. En plus, Pierre et les autres dirigeants avaient déjà fait face à des situations difficiles. Et puis, l’Église avait encore besoin de lui. Que deviendrait-elle sans lui ? Les possibilités d’évangélisation autour de Jérusalem commençaient à s’ouvrir. Bref, il y avait encore énormément à faire.
Souvent, des pasteurs et des missionnaires, une fois dépassé un certain âge (au lecteur de constater lequel à peu près), s’accrochent à l’œuvre qu’ils ont créée, ou aidée à développer. On a tendance à poser ses bagages et de rester, même si le travail est devenu dur, rébarbatif, pour ne pas dire épuisant. À une nouvelle perspective qui s’ouvrirait si on levait à nouveau l’ancre pour prendre le large, on préfère tourner en rond. Certes, la fidélité et la persévérance sont en soi de bonnes qualités qui sont tout à fait à l’honneur d’un dirigeant. Mais elles perdent leur sens, à mon avis, quand elles deviennent des prétextes pour accepter, selon les cas, le calme plat ou la guerre de tranchées - «je ne quitte pas mon poste, advienne que pourra». Là, on commence à se sentir indispensable, du moins sur le moment. Et en plus : que faire d’autre? On n’a pas nourri l’esprit entrepreneur, on est devenu craintif face à l’inconnu, et des effets collatéraux.
C’est l’âge, dit-on.
On pense ne plus pouvoir apprendre une autre langue. Ne plus pouvoir s’adapter à une autre culture.
Eh bien, Pierre, quadragénaire, presque quinquagénaire, a osé tout cela. Il n’a pas attendu jusqu’à ce que la situation se calme pour faire sa réapparition et reprendre son ministère tant béni. Non, il a laissé tout derrière lui pour «s’en aller dans un certain lieu».
Comprenne qui pourra; cette phrase sort directement d’Ézéchiel 12.1-3, où Dieu donne l’ordre au prophète de partir de Jérusalem avec un «équipement de déporté» vers «un autre lieu», à savoir Babylone. En effet, un peu plus tard, Pierre va envoyer une lettre depuis «Babylone»(2). Selon certains, ce nom signifie effectivement la ville de Babylone, d’autres pensent qu’il fait allusion à Rome. Quoi qu’il en soit, Pierre se lance dans une nouvelle aventure, si je puis m’exprimer ainsi. Il entame des voyages missionnaires. Il va servir différentes églises, où il n’a pas de réputation ni de statut, notamment celle de Corinthe(3), celle d’Antioche - pendant sept ans, selon les sources anciennes - et d’autres encore. Finalement, il va arriver à Rome pour y servir l’Église. En 67, il est crucifié, comme le Seigneur l’avait déjà prédit juste après la résurrection, au bord du lac de Tibériade: «Quand tu seras vieux, tu étendras tes mains, et un autre te l’attachera et te mènera où tu ne voudras pas», ce qui fut compris comme étant un indice « de quelle mort Pierre glorifierait Dieu» (Jn 21.18-19)(4).
Survivants de risques
Pour conduire les autres, un dirigeant doit être en mouvement lui-même, prenant fait et cause pour le Seigneur. Oser le chemin risqué, pour le bien d’autrui. À ce propos, j’aimerais citer Klaus Müller, missionnaire allemand et professeur en missiologie à la faculté de Louvain. Il écrit ceci :
«Dans la mission, il ne s’agit pas tellement d’hommes très forts qui accomplissent beaucoup, mais plutôt de ce que l’on garde les yeux fixés sur les objectifs de Dieu, et de ce que l’on se laisse motiver par l’amour du Seigneur Jésus Christ et par l’amour pour un monde pas encore réconcilié avec Dieu, et de prendre les risques de la foi. Même ceux qui doutent, sont impliqués dans l’œuvre de Dieu… La plupart des personnes dont on écrit des biographies, sont des survivants des risques…Ce ne sont pas seulement les jeunes, d’ailleurs, qui doivent exercer la foi et qui doivent faire face à leurs limites. Les vieux doivent également s’entraîner dans le domaine de la foi. Là, il n’y a pas d’intérêt à tirer d’un passé…Pauvre foi, qui ne veut plus tester ce que Dieu veut encore accomplir par elle»(5).
Oser dans la foi n’est pas une garantie pour la réussite. Il y aura des blessures, voire des échecs. Bien souvent, on perd confiance, de peur que l’on se heurte à nouveau à la même pierre, et on a du mal à motiver les autres. Je cite à nouveau Klaus Müller :
«C’est risqué de conseiller aux jeunes de prendre des risques, quand on a échoué. Mais si l’on a échoué, cela ne veut pas dire que les autres ne devraient plus rien oser. Seulement celui qui est ressuscité des cendres des risques de sa foi et qui constate que Dieu est vivant, et que la promesse de sa présence s’applique encore, est capable d’encourager les autres d’oser, eux aussi, quelque chose de nouveau»(6).
2. Se laisser «tailler» aux travers des aléas de son ministère

Cet épisode, justement, nous montre une deuxième qualité d’un dirigeant. Pierre était prêt à se laisser « tailler » aux travers des aléas de son ministère.
Est-ce que Pierre avait un caractère qui le prédisposait, de façon naturelle à devenir un apôtre fondateur de l’Église ? Dans la littérature sur le « leadership », thème "tendance" dans le monde évangélique aujourd’hui, on affirme souvent qu’il faut avoir un certain profil pour devenir un « leader », que l’on développera par la suite. Sinon, on ne réussira jamais, donc ce n’est même pas la peine de se laisser former à cela(7).
Certes, les uns y sont plus aptes que les autres, de par leur personnalité. Mais je ne crois pas au prédéterminisme en la matière. Regardez par exemple Pierre. S’il avait des traits de caractère requis pour être un dirigeant, il avait également pas mal de défauts qui le disqualifiaient. Il avait besoin d’être taillé, et d’apprendre. Et c’est cela que son Maître a fait, tout au long de sa vie.
Idem pour nous. Nul n’est déjà apte au ministère de dirigeant de par ses seuls dons naturels, aussi impressionnants soient-ils. En revanche, personne n’est condamné à rester sur la touche à cause de ses défauts ou ses péchés, aussi nombreux soient-ils. Ce qui importe, c'est de se laisser tailler au travers des aléas de son ministère.
Facteur salutaire
Dans son étude sur la vie des apôtres, William McBirnie décrit le caractère de Pierre comme suit:
«Pierre était une combinaison rare de courage et de lâcheté, de grande force et d’instabilité regrettable. Aucun des disciples ne fut si souvent réprimandé par notre Seigneur comme Pierre, aucun des disciples n’a jamais osé réprimander notre Seigneur comme Pierre. Et pourtant, au fur et à mesure d’être sous l’influence de l’exemple et la formation du Christ, le caractère ouvertement tempétueux fut mis sous contrôle, jusqu’à ce que, finalement, après la Pentecôte, il devienne la personnification de la fidélité au Christ»(8).
Et d’ajouter un constat de la plus haute importance :
«Il y avait un facteur salutaire dans le caractère de Pierre, c’était d’être extrêmement sensible au péché»(9).
Dans la nuit pascale, Pierre a échoué. Si Judas a trahi son Maître, Pierre l’a maudit. Normalement, de telles fautes graves signifient la fin d’un ministère.
Il en est de même pour nous. Soit on tombe dans le péché. Soit on accumule les erreurs et les maladresses. Soit on se met toute la communauté à dos par un comportement autoritaire. Ou bien, tout simplement, on n’arrive plus à rester fidèle au Seigneur. Nul n’est à l’abri de ces choses-là. Elles amènent des échecs, parfois même ce que l’on appelle « la mort du ministère ».
Est-ce la fin de l’exercice? Pas forcément. Cela dépend de nous. De ce que nous reconnaissions le péché et que nous laissions le Seigneur travailler les sources du problème, dans le plus profond de notre cœur.
Pierre avait cette qualité. C’est ce qui a «sauvé» son ministère.
Pendant cette nuit pascale où il tomba si bas, Jésus l’a regardé, et Pierre n’a pas fui son regard. Il ne s’est pas durci, il n’a pas rejeté la faute sur les autres, les circonstances, son éducation, sa jeunesse. Pas de facteurs atténuants. Non, il a assumé. Et il a pleuré des larmes de remords. Il a pleuré amèrement.
Cette nuit là, Jésus a vu la sincérité de son cœur, entendu le cri de quelqu’un qui avait tout perdu. Et il l’a réhabilité en lui posant l’unique question qui importe quand on vit la mort de son ministère: «Simon, m'aimes tu?» Dans ces quelques mots, tout est dit.
Mais attention. Si Pierre fut réhabilité, il n’a pas tout simplement repris son ministère. Désormais, il servait le Seigneur autrement. Plus humblement.
Si un dirigeant n’arrive pas à avouer ses méfaits ni à en assumer les conséquences, si la repentance lui est trop difficile, trop humiliante, comment saura-t-il conduire les autres dans ces domaines-là?
3. Savoir changer d’opinion

Quand on dirige une Église ou une œuvre, on s’expose à des critiques. Quelqu’un à qui cela fait peur, ferait mieux de chercher un autre métier pour glorifier Dieu. Parfois, les critiques sont fondées, ce qui arrive d’ailleurs plus souvent que l’on ne pense. C’est là où l’on doit avoir la largesse de se mettre en question, de demander pardon si nécessaire. Je viens d’en parler.
Mais parfois, les critiques ne sont pas vraiment justifiées, ce qui arrive d’ailleurs moins souvent que l’on ne croit. Alors, que faire ?
En Matthieu 16, Pierre fait une confession de foi audacieuse, mais il est tout de suite repris par Jésus quand il conteste l’idée que le Messie devrait mourir. Ce qui m’intéresse maintenant, ce ne sont pas les aspects théologiques suscités par le différend qui l’opposait au Seigneur, mais sa capacité de changer d’opinion, quoi que les autres puissent en penser. De toute évidence, il avait du mal. Ce n’est pas chose facile pour quelqu’un qui est à la tête du troupeau, et qui vient de définir la doctrine christologique de toute la communauté de disciples, de revenir sur ses propos et d’avouer: j’ai mal compris.
 Et pourtant, c’était inéluctable, et bien nécessaire.
Pierre a dû revoir sa copie. Après la résurrection, il l’a compris et il le dit ouvertement, le jour de Pentecôte: c’est selon le dessein arrêté et selon la prescience de Dieu que le Christ fut livré et crucifié (Ac 2.23).
Attends, lorsque Pierre fut repris par le Seigneur, allez-vous me dire, il était encore en formation. C’est normal pour un étudiant en théologie de revoir des opinions mal fondées qu’il s’est faites au début de sa vie chrétienne. C’est vrai. En formation, on s’ouvre à d’autres opinions, on étudie en profondeur, on apprend à toujours apprendre. Or, cela ne doit pas s’arrêter là mais devenir une attitude pour le reste de la vie, cette ouverture d’esprit, cette humilité académique. Malheureusement, on constate trop souvent le contraire. Une fois pasteur, une fois responsable des études bibliques, on a tendance à redire ce que l’on a appris, répéter ses opinions. Et de camper sur sa position quand on est confronté à d’autres points de vue.
Ceci n’est toutefois pas une qualité qui fera de nous de bons dirigeants. Ceux qui ont du mal à revenir sur leurs opinions, deviennent inflexibles, autoritaires, difficiles à aborder. Pas difficile d’en trouver des exemples concrets.
Ainsi va la culture française. Plus on monte en grade, plus on est sûr de soi. Plus on a des responsabilités, moins on affiche ses incertitudes, ses doutes. Un patron sait ce qu’il fait et où il va, il est en tout cas censé le savoir, puisque c’est lui qui donne des ordres.
Se remettre en question et revenir sur ses opinions, dans la culture française, c’est fatal.
Mais pour un dirigeant dans l’œuvre du Seigneur, c’est vital.
Sortir de la barque
En Actes 10, nous voyons Pierre, l’apôtre accompli, le leader incontestable de l’Église de Jérusalem, celui dont l’ombre suffisait déjà pour que les malades soient guéris, ce Roc dans l’œuvre de Dieu, changer publiquement d’avis sur une question très importante à l’époque : un Juif peut-il être fidèle aux commandements de Dieu et entrer dans la maison impure d’un païen, lui serrer la main impure, et partager le repas impur avec des gens impurs?
Pierre ne l’avait jamais fait depuis le jour de Pentecôte, plusieurs années en arrière déjà. Il fallait une vision et une voix du ciel pour que l’homme qui avait marché sur les eaux, sorte de sa barque juive et se lance dans les eaux troubles de la culture païenne d’un militaire gradé romain, etc. Vous connaissez la suite de l’histoire.
Pierre a eu l’audace de le faire. Après cela, il s’est défendu face aux critiques auxquelles il pouvait s’attendre. Actes 11 est un bel exemple de ce qu’un dirigeant puisse se remettre en question et se montrer prêt à changer d’opinion. En tant que dirigeants, nous allons certainement nous trouver dans des circonstances où telle démarche s’impose, selon que le Seigneur nous montre des choses auxquelles nous n’avions pas encore pensé. Sinon, comment voulons-nous que ceux qui sont confiés à notre conduite, reviennent sur leurs erreurs à eux?
Avouer un tort, revenir sur une opinion qui s’est avérée erronée, dire que l’on ne comprend pas encore tout à fait un certain point, ce n’est pas une défaite. Pas un signe de faiblesse. C’est une qualité d’un dirigeant dans l’œuvre du Seigneur, et tout à fait à son honneur.
4. Comment gérer la diversité? Le "Non prophétique" et le "Oui pastoral"
En Galates 2, Paul décrit un moment délicat, pour ne pas dire douloureux dans l’Église d’Antioche ; la confrontation entre lui et les apôtres Pierre et Barnabé. Vous connaissez l’histoire. Dans un premier temps, Pierre mange avec les croyants non Juifs, mais quand une délégation de l’Église de Jérusalem vient voir ce qui se passe, Pierre change de compagnie, rejoignant les croyants Juifs. Alors, Paul s’indigne. Selon lui, c’est condamnable, et il le dit sans mâcher ses mots. «Tout apôtre que tu es, Pierre, tu agis comme un hypocrite qui a peur du jugement des Juifs. En plus, tu veux imposer la tradition juive aux païens».
Moi, j’ai longtemps pensé que ce fut là un moment de faiblesse de la part de Pierre. On la lui pardonne volontiers, sachant que nous sommes tous faits de la même pâte que lui.
Une autre lecture ?
Mais une lecture plus attentive au contexte culturel de cet épisode, m’a amené à voir les choses un peu différemment.
D’abord, on n’a que l’interprétation de Paul. Au moment de rédiger sa lettre aux Galates, il est persuadé que le comportement de Pierre revient à imposer un style de vie judaïque à tous les chrétiens. Et ça, c’est condamnable, effectivement. Mais était-ce vraiment l’intention de Pierre de «judaïser» les païens? Quel est le point de vue de Pierre, et de Barnabé d’ailleurs? Dans le NT, ils ne s’expliquent pas. En tout cas pas explicitement.
Deuxièmement, il faut savoir comment l’Église d'Antioche s’est développée pour comprendre ce qui s’est passé. Fondée par des réfugiés Juifs venus de la Judée, cette Église va accueillir des Juifs de la Diaspora, et plus tard aussi des non-Juifs. Aujourd’hui on dirait qu’elle était devenue multiculturelle. Elle était le champ de travail de Paul. Son enseignement avait ceci de particulier, qu’il ne demandait pas aux Gentils de suivre toutes les coutumes juives basées sur la Loi de Moïse. En revanche, les croyants Juifs pouvaient les suivre, ce qu’ils faisaient, en effet. Donc à une diversité culturelle s’est ajoutée une diversité théologique.
Probablement, les deux principaux groupes se réunissaient séparément pour manger. C’est ce que Galates 2.12 laisse penser. Peut-être dans différentes maisons. C’est à cause, justement, des règles alimentaires et de purification, observées par les croyants Juifs, ou la plupart d’entre eux, mais non pas par les autres.
Dans l’exégèse, il est coutumier de rapprocher cette situation du concile de Jérusalem dont Actes 15 nous donne le résumé. La question qui préoccupait le concile était de savoir si les Gentils dans l’Église seraient obligés ou non de pratiquer toutes les lois de Moïse dans la même mesure que les croyants Juifs. On connaît la décision. À Antioche, il y avait certainement un certain nombre de fidèles qui essayaient de «judaïser» les païens, puisque la décision du concile lui fut communiquée spécialement par missive «apostolique».
Or, la question est de savoir, si Pierre (et Barnabé) se sont rangés à cette position, eux aussi. Paul en était persuadé, en effet, d’où sa réaction véhémente. Mais il est possible qu’il y ait eu là un malheureux malentendu entre lui et Pierre. Une façon différente de gérer la diversité dans l’Église.
Regardons de plus près. Le concile n’a pas traité de la situation décrite en Galates 2.12: différents groupes dans l’Église ont leurs repas séparés. Dans l’Église d’Antioche, ils avaient le droit d’exprimer leur spécificité culturelle, aussi dans le domaine important de la communion de table. Tant qu’ils n’imposaient pas leur façon de faire aux autres, la décision d’Actes 15 ne s’appliquait pas à eux. Effectivement, d’après ce que Paul rapporte, Pierre ne semble pas avoir obligé les païens à le suivre et à rejoindre les Juifs dans l’Église. Mais Paul voyait le danger: le chemin que vous empruntez est mauvais, puisqu’il va certainement aboutir à cela.
Troisièmement, j’ai du mal à comprendre comment Pierre, qui a défendu, lors du concile, la liberté prônée par Paul, puisse vraiment «judaïser» peu avant ou peu après(10). D’autant plus que c’est lui qui était le premier à entrer dans une maison païenne, celle de Corneille, pour y communiquer l’évangile et vivre un moment de fraternité (Ac 10).
Un jour, Pierre arrive dans cette Église. Il est nouveau, tandis que Paul, lui, est l’un des «leaders». C’est lui qui exerce l’autorité, non pas Pierre. Dans un premier temps, Pierre rejoint les convertis non Juifs. Ainsi soutient-il la mission parmi les Gentils et leur inclusion dans l’Église. Mais il semble y avoir une sorte d'accord qui stipule que Pierre devrait s’occuper de l’évangélisation d’Israël et des croyants Juifs, tandis que Paul devrait s’occuper de la mission auprès des autres peuples (Ga 2.8-9). Une délégation de chez Jaques arrive. Pourquoi? Théoriquement, il est possible que les dirigeants veuillent rappeler Paul et Barnabé à l’ordre. C’est ce que l’on lit le plus souvent dans les commentaires.
Et si leur «cible» n’était pas Paul mais Pierre? C’est bien aussi possible. Moi, je suis enclin à le penser. À Jérusalem, on voyait d’un mauvais œil le comportement de Pierre à Antioche, dans la mesure où ceci pouvait être interprété comme une négligence de sa responsabilité vis-à-vis des Juifs. Comme une prise de position en faveur de la lignée théologique de Paul.
Conscient de leur pensée, Pierre quitte les repas des croyants non-Juifs pour manger désormais avec les croyants Juifs. Selon Paul, il agit par peur. Il «esquivait» les délégués.
Mais de quoi, Pierre, réputé pour son audace, pourrait-il bien avoir peur? Selon Carsten Thiede, il avait peur d’une confrontation qui entraînerait la scission de l’Église en deux Églises. Notons, au passage, que la solution protestante évangélique aux tensions suscitées par la diversité culturelle, théologique et liturgique, à savoir la création d’une variété toujours croissante de dénominations et d’Églises autonomes, n’existait pas encore à l’époque de la confrontation à Antioche. Là, il fallait à tout prix trouver pour tous un modus vivendi. Sinon, un schisme semblait inévitable.
Pour éviter un tel drame, Pierre fit un geste de conciliation. Il voulait montrer que dans une Église aussi diverse que celle d’Antioche, on peut manger avec les Juifs en respectant leurs coutumes, et avec les Gentils sans s’en tenir aux règles du cachrout. Histoire de donner aux responsables un exemple de direction flexible(11).
Aux yeux de Paul, c’est une manière de ménager la chèvre et le chou. Un compromis face aux exigences des « judaïsants », et donc une entorse à la liberté en Christ. Si Paul défend bec et ongles la position théologique prise par le conseil de Jérusalem, Pierre semble se soucier davantage des conséquences pratiques.
Pierre, lui, se trouve pris en tenaille entre deux positions. J’imagine, je sais très bien que ce n’est pas écrit explicitement, mais c’est ma lecture de ce qui nous est rapporté, que Pierre avait peur que les délégués de Jérusalem et Paul restent aussi intransigeants les uns comme les autres. Peur que les uns ne fassent qu’enfermer le courant juif dans un mode de vie strictement judaïque et de l’isoler du reste de l’Église. Et peur que Paul, lui, ne pousse trop loin le bouchon de la liberté en Christ.
Un « clash » entre deux visions de « leadership »
Si cette lecture est juste, on a affaire à un «clash» entre deux visions de «leadership». Celle du prophète et celle du berger.
Je le pense, effectivement, d’autant plus que ce n’est pas Paul qui reste et Pierre qui quitte l’Église, mais l’inverse. Paul part en mission et ne reviendra jamais, sauf pour une escale très brève («quelque temps»), quand il est en route vers Jérusalem (Ac 18.23). Je ne vais pas jusqu’à dire avec James Dunn que «finalement, c’est Pierre qui a gagné»(12), mais j’ai l’impression que l’approche de Pierre n’a pas été écartée du terrain. Bien au contraire.
Dans un premier temps, Pierre est dénoncé par Paul pour son comportement taxé trop flexible. Par la suite, ce dernier semble toutefois avoir adopté, lui-aussi une position plus conciliaire, plus flexible, plus «pastorale». Quelques années plus tard, il écrit aux Corinthiens: «bien que je sois libre à l’égard de tous, je me fais le serviteur de tous, afin de gagner le plus grand nombre. Avec les Juifs j’ai été comme Juif… avec ceux qui sont sans loi, comme sans loi, et pourtant je ne suis pas moi-même sans la loi de Dieu» (1 Co 9.19-23). Il est intéressant de lire Tertullien qui évoque, justement, ce passage pour «prendre la défense de Pierre»(13).
Carsten Thiede en arrive à la conclusion que «le style de leadership de Pierre s’est avéré acceptable pour les chrétiens à Antioche. Et Paul l’a appris, lui aussi, ce qui est la marque de sa grandeur»(14).
Si ma lecture de cet épisode est juste, et si on a affaire à deux visions de leadership, j’aimerais ajouter que les approches de Paul et de Pierre ne s’excluent pas mutuellement. En tout cas, pas toujours. Le «non prophétique» est indispensable et fort nécessaire, mais le plus souvent il a besoin d’être complété par un «oui pastoral». Et inversement. Un dirigeant doit savoir prononcer les deux, et savoir quand il faut mettre l’accent sur l’un plutôt que sur l’autre.
5. Savoir apprécier le talent des autres
Une cinquième qualité que Pierre a cultivée est son appréciation des personnes talentueuses, plus compétentes que lui dans certains domaines, plus douées par le Saint-Esprit à certains égards. Souvent, un dirigeant à peur de ceux qui pourraient lui voler la vedette. De telles personnes constituent une menace à son autorité. Il a du mal à leur laisser la place dans l’Église, puisqu’il sait très bien qu’il ne peut pas les traiter comme des auxiliaires, des aides, des porteurs de ses valises.
Voilà un grand problème dans le «leadership» aujourd’hui. Sous l’ombre d’un grand chêne rien ne pousse, dit-on. Sous l’ombre d’un pasteur qui se veut grand non plus.
C’est pourquoi on voit des gens compétents quitter l’assemblée, souvent après une ou plusieurs confrontations. Ceux qui trouvent telle assemblée trop étroite, et le pasteur trop ceci et trop peu cela, vont ailleurs, rejoindre une autre Église où l’histoire risque fort de se répéter, tôt ou tard, et ainsi de suite. Ou ils créent une nouvelle Église dont ils peuvent être le chef incontesté. Ou bien, ils rejoignent une œuvre. Autre option : partir en mission. Ou encore: se concentrer sur la carrière professionnelle et se désengager de l’œuvre du Seigneur. On ne compte pas ceux qui s’immobilisent «dans la nature», après avoir été rebutés par les traditions d’une Église. C’est un véritable drame.
Pierre était un grand homme. Un véritable révérend. On lui donnerait le titre de docteur «honoris causa». Mais il ne vivait pas son statut comme quelque chose à lui. Quelque chose qu’il fallait défendre, mettre en sécurité, et affirmer à tout bout de champ. Non, son ministère était pour lui une grâce. Comment pourrait-il en être autrement, après sa déconfiture pendant la nuit pascale, et après être gracié par le Seigneur ressuscité?
Regardez comment il donne l’honneur aux autres dans ses épîtres.
Au lieu de décrire lui-même le message qu’il annonçait et l’enseignement qu’il dispensait, il l’a laissé à Marc. Sans doute parce que Marc était meilleur écrivain que lui. Par conséquent, c’est Marc l’auteur de l’évangile de Pierre(15).
Au lieu de formuler son testament spirituel lui-même, il laisse la place à Sylvain, sans doute parce qu’il avait une belle plume. C’est pourquoi, Sylvain a rédigé l’épître qui porte le nom de Pierre, et Pierre tient à le remarquer (1 P 5.12).
Et écoutez bien les paroles bienveillantes qu’il consacre à Paul, celui qui n’avait pourtant pas été très tendre avec lui dans l’Église d’Antioche. Paul l’a ouvertement traité d’hypocrite (Ga 2). De son côté, Pierre n’a pas médité la revanche. Au contraire, il a reconnu que sur le plan théologique, Paul avait une meilleure connaissance de certaines choses. Et il rend hommage à la sagesse qui a été donnée, non pas à lui-même, mais à Paul (2 P 3.15).
Un dirigeant qui se sent menacé par des collaborateurs plus compétents que lui dans certains domaines, va jouer son autorité et étouffer le potentiel. Il va finir par être entouré de médiocrité.
Un vrai dirigeant connaît ses limites et sait apprécier le capital humain dont il est entouré. Sous sa direction, les talents des autres peuvent éclore. Ceux qui ont envie de servir selon leurs qualités seront encouragés.
6. Axer le ministère sur le caractère

Pour la sixième et dernière qualité que je déduis du parcours de Pierre, je peux être très bref, tellement elle parle de soi. Dans ses épîtres, Pierre transmet ce qu’il a appris au fil des années. En matière de ministère pastoral ou autre, il souligne que le dirigeant doit servir de bon cœur, et qu’il doit diriger en étant un modèle du troupeau (1 P 5.1-4). Un modèle de quoi? Dans la seconde épître, il s’explique: un modèle de croissance spirituelle, dont l’aspect le plus important est l’amour – écho de la question de Jésus au bord du lac: Pierre, m’aimes-tu? Et sa mission: Fais paître mes brebis. Tout cela revient à dire que le ministère, pour porter du fruit qui demeure, doit être axé sur le caractère.
En fin de compte, les gens que nous servons dans l’Église et à qui nous communiquons l’Évangile en dehors de l’Église, de près ou de loin, ne retiendront que très peu de ce que nous avons dit ou fait. Mais ils se souviendront souvent, presque toujours, de la manière dont nous l’avons dit ou fait. C’est le caractère, exprimé au travers du ministère, qui laisse l’impression la plus durable. Pour le meilleur ou pour le pire.
Pierre nous exhorte: «faites tous vos efforts pour joindre à votre foi la vertu, la connaissance, la maîtrise de soi, la persévérance, la piété, la fraternité et l’amour. Elles ne vous laisseront pas sans activité ni sans fruit…» (2 P 1.4-8).
 Je cite, enfin, encore une fois, Klaus Müller:
«Ce qui importe, ce n’est pas ce que nous pensons faire pour Dieu, mais ce que Dieu opère en nous et au travers de nous. C’est cela qui demeure en éternité. Au lieu de nous construire des monuments à notre mémoire, nous devons construire le Royaume de Dieu. Et quand nous ne sommes plus là, d’autres vont poursuivre ce travail»(16).

Bibliographie
 (1) Cf. Blass/Debrunner/Rehkopff, Grammatik des neutestamentlichen Griechisch, Göttingen (Vandenhoeck & Ruprecht), 1984, § 360 et 372. Selon les auteurs, e? suivi d’un indicatif présent signifie, en règle générale une réalité. On doit le traduire par «quand» ou «par conséquent» (implication de ce qui précède). Très souvent, le sens est proche de la conjonction causale «comme» (p.302, § 372, point 1).
(2) Sa première (1 Pi 5.13). Si la date de cette lettre est incertaine, elle doit se situer, de toute évidence entre le départ de Pierre de Jérusalem en 42 apr. J.C. et peu avant sa mort à Rome en 67 apr. J.C.
(3) Ce qui explique l’existence d’un courant « de Céphas » dans cette église, 1 Co 1.12.
(4) Nombreuses sont les reconstructions du parcours de Pierre après qu’il a « quitté » le récit des Actes. Je me suis référé, notamment à Oscar Cullmann, Petrus : Jünger - Apostel - Märtyrer, Munich (Siebenstern), 1960, et, plus récent, Carsten Thiede, Simon Peter : From Galilee to Rome, Exeter (Paternoster), 198
(5) Klaus Müller, "Glaube, Risiken und Nebenwirkungen", Evangelikale Missiologie, 2006, n°1, p.3.
(6) Ibid., p.5.
(7) Ce genre de propos, on le trouve, par exemple, chez John G. Maxwell, auteur évangélique, dans son ouvrage assez connu, Developing the Leader Within You, Nashville (Thomas Nelson), 1993.
(8) William Steuart McBirnie, The Search for the Twelve Apostles, Wheaton (Tyndale), 1972, p.51.
(9) Ibid., p.51.
(10) Quant à la question si l’épisode en Galates 2 ait eu lieu avant ou après ce concile, les spécialistes avancent différentes réponses, mais cela ne change pas grand-chose à mon interrogation.
(11) Carsten Thiede, op. cit., p.166s.
(12) James G. Dunn, Unity and Diversity in the New Testament, London (SCM), 1977, p.254.
(13) I will put in a defence, as it were, for Peter, to the effect that even Paul said that he was “made all things to all men - to the Jews a Jew,” to those who were not Jews as one who was not a Jew - “that he might gain all.”
Tertullien, Adversus Marcionem, 1.23. Source de la citation : Ante Nicene Fathers, Grand Rapids (Eerdmans), 1975, Vol. III, tome II.
(14) Carsten Thiede, op. cit., p.166.
(15) Toutes les sources post-apostoliques s’accordent à dire que l’évangile de Marc constitue en fait le message et l’enseignement de Pierre. Marc écrit ce que Pierre lui a transmis. Mais il le fait avec une certaine liberté de plume, selon sa propre composition.
(16) Klaus Müller, op. cit., p.4.

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