vendredi 6 juin 2014

ACHAT DE CONSCIENCE : VECTEUR DES SOUFFRANCES EN AFRIQUE


« Si tu ne te bats pas pour ce que tu veux alors ne pleures pas pour ce que tu as perdu»

La conscience se définit par la capacité de se percevoir, s'identifier, de penser et de se comporter de manière adaptée. Elle est ce que l'on sent et ce que l’on sait de soi, d’autrui et du monde. En ce sens, elle englobe l’appréhension subjective de nos expériences et la perception objective de la réalité. Par elle, enfin, nous est donnée la capacité d’agir sur nous-mêmes pour nous transformer. La propriété particulière de la conscience humaine permet à l’homme de porter des jugements normatifs, immédiats, fondés sur la distinction du bien et du mal. Mais, lorsqu’on vend sa conscience, on abandonne à d’autres personnes, en échange de certains avantages, son pouvoir et son droit de juger par soi-même et de se déterminer librement. 

En résumé, le mot conscience vient du latin et signifie « avec science », avec un apport extérieur, une lumière qui nous est donnée. On parle souvent de « conscience éclairée ». Le travail de la conscience n’est pas isolé du monde dans lequel je vis. La conscience a besoin de se nourrir des apports du monde extérieur pour permettre à l’intelligence du cœur, au travail de l’esprit, à la raison, d’émettre un avis, de juger, et de permettre à d’autres d’avancer et de vivre ensemble.

Elle nous permet d’émettre des jugements de valeur sur les actes que nous posons ou que d’autres posent et qui ont une influence sur nos vies. Si quelqu’un décide de voter telle ou telle loi, cela aura des conséquences sur la vie des autres.

Dans un pays en souffrance, les bonnes vieilles habitudes perverties par la politique ne trahissent jamais. L’achat de conscience par de petites enveloppes ou par des récompenses devient tout simplement un geste anodin qui donne plaisir à tous. Il paraît aussi l’application d’une autre valeur en mode de : « chercher à manger ». En effet, tous les processus électoraux, à toutes les échelles sociales, ont toujours été piégés par des pratiques peu orthodoxes et indignes de la démocratie en Afrique. Deux exemples suffisent pour corroborer ce qui précède.


Achat de conscience des électeurs


Depuis toujours, toutes les élections organisées en Afrique ont été l’occasion pour les partis politiques (parti au pouvoir ou d’opposition) d’inventer des stratégies pour séduire l’électorat. A la place des projets de sociétés et des programmes, ce sont des biens (de peu de valeur d’ailleurs) et de l’argent (une somme dérisoire) que les candidats donnent en échange des voix des électeurs. En effet, est présidentiable en Afrique, le candidat qui sait distribuer des billets de banque ou distribuer des paquets du sucre, du café, du sel. Et c’est à partir de telles pratiques que l’africain a acquis la mauvaise idée de ce que signifie une élection. Pour lui, quel que soit son choix politique, le résultat sera toujours faussé. Autant se contenter des friandises qui lui sont offertes. 

C’est tellement vrai que les campagnes électorales en Afrique sont de véritables foires où chacun s’offre l’opportunité d’adouber tous les candidats de passage dans sa localité, en échange de quelques billets et des T-shirts à l’effigie du candidat. C’est aussi l’occasion où certains intellectuels véreux se prostituent politiquement pour arrondir les fins du mois. Lors des élections présidentielles, il y a des électeurs qui se disputent, jusqu’à venir aux mains au sujet de l’argent laissé par le candidat. Quelques rares partisans d’opposition purs et durs, peuvent toutefois repousser l’argent. Par exemple, l’un d’eux était à couteaux tirés avec son épouse, à cause d’un pagne frappé à l’effigie du Chef de l’Etat. Bien sûr, la femme en voulait ! Mais, dans son éthique politique, parce que membre d’opposition, le mari a refusé catégoriquement d’accepter ce qu’il qualifiait de cadeau empoisonné, de tentative d’achat de voix.

En outre, il y a une autre pratique qu’il ne faut jamais laisser passer sous silence : des slogans d’intimidation comme arme de dissuasion. Parfois, le langage guerrier connoté du tribalisme s’invite comme thème principal aux échéances électorales : « si vous ne votez pas tel candidat, telle tribu reviendra au pouvoir et vous verrez » ; « pas question de mettre en péril la paix chèrement acquise. Alors, votez utile ! ». C’est ainsi que certains bulletins n’offrent qu’une alternative : opter pour tel bulletin est synonyme de désordre, et opter pour l’autre, c’est le synonyme de paix et de stabilité. 

Au regard de tout cela, il est temps de rappeler que les partis politiques ont failli à leur mission de former leurs militants. Ils ont failli au devoir d’amener leur électorat au respect, d’une part, des droits civiques et politiques et, d’autre part, à la nécessité de comprendre que le vote reste malgré tout un droit imprescriptible des individus dans une République. Droit sans lequel ils cessent d’être citoyens. Le droit de vote est la base de la démocratie. Il permet aux citoyens d’exprimer leur volonté ; de participer au changement. Ils peuvent ainsi élire leurs représentants (parlementaires) et leurs gouvernants (président de la République), et participer directement à la prise de décision politique lorsqu’un texte est présenté à leur approbation par la voie du référendum. Cela dit, quels que soient les résultats d’un vote, il ne reste pas moins un acte citoyen et/ou un devoir civique. Troquer sa voix contre de l’argent ou du bien matériel doit être considéré comme une aliénation pure et simple de sa liberté et de sa citoyenneté. C’est une manière d’ouvrir sa porte à la souffrance. C’est ce que nous récoltons aujourd’hui.


Achat de conscience des acteurs politiques

Le difficile passage de l’Afrique du monopartisme au multipartisme a été marqué par le comportement de certains acteurs politiques qui ont vendu leur conscience. En fait, à cause de la corruption ou l’achat de conscience, la jeune démocratie africaine marche à fronts renversés.

Par exemple, grâce au débauchage d'un député de l'opposition, la démocratie subit plus une fragilisation inédite et provoque davantage le calvaire du peuple africain. En effet, le système tel qu’il est pratiqué, est devenu aujourd’hui une tradition politique et poursuit son petit bout de chemin sans aucune entrave. Par contre, le citoyen qui se laisse prendre à ce jeu d’achat de conscience n’est pas loin d’être considéré comme un mouton que le propriétaire amène à brouter dans n’importe quel pré et l’amène ensuite à l’abattoir pour l’égorger sans autre forme de procès. Mais, les moutons vont à l'abattoir, ils ne disent rien, eux, et ils n'espèrent rien. Mais au moins ils ne votent pas pour le boucher.
A cette imposture, viennent s’ajouter tous les engagements avec les milieux des esprits : entendez par là les loges ou sectes pernicieuses, les marabouts, les sorciers et autres petits féticheurs du quartier, au point que tout le monde se fait poli, docile et candide ; mêmes les loups se couvrent de la peau d’agneaux pour la circonstance.

Mais après la publication des résultats des urnes, on assiste à une espèce de transformation quasi mystique de tous ces agneaux : l’arrogance, le mépris, l’ingratitude, le mensonge, l’insouciance, les rapines, etc...

 A cause de peu d’exigences des citoyens et l’absence de la culture politique, les politiciens véreux abusent toujours du peuple ; raison pour laquelle la classe politique africaine devient davantage plus riche pendant que le peuple, lui, continue à tirer le diable par la queue. 

Tel est quasiment l’état des lieux de la situation politique dans le pays, telle est la nature de rapports entre la classe politique centrafricaine et le peuple souverain. Les élections mal organisées, truffées d’achats de conscience des électeurs sont souvent la base des conflits politiques, lesquels sont accentués par la destinée sociale du peuple centrafricain. 

Cet achat de conscience trahit l'immaturité politique des électeurs et prouve que le peuple centrafricain n'a pas encore atteint une conscience citoyenne forte et des convictions politiques solides. Tant que la Centrafrique continuera à s'engluer dans cette pratique honteuse et stérile, la misère et la pauvreté prévaudront toujours.


 Reprise de conscience et halte à la corruption !

La campagne électorale ne doit plus être considérée comme une foire commerciale où voix et billets de banque sont échangés entre électeurs et candidats. Certes, les électeurs centrafricains attachent un prix au dépôt d'un bulletin dans l'urne mais la citoyenneté balbutiante a d'abord pour nom « vote acheté ». 

En lieu et place des projets de société qui doivent être confrontés par les différents candidats pour séduire l'électorat, c'est un véritable marché d'appel d'offre où le plus offrant n'est pas celui dont la politique est plus proche des électeurs mais celui qui s'exprime par l'importance de ses moyens financiers et matériels.
 Le clientélisme électoral, très perceptible chez les électeurs pour qui, la période électorale est le moment où l'on peut ”manger" les hommes politiques, dit-on. Cela doit cesser. Il est temps que le peuple africain reprenne son esprit pour comprendre que sa voix est une arme démocratique pouvant le libérer de tout asservissement. Se faire acheter la conscience, c'est se condamner à vivre dans la misère pour toujours.

 
 Prof. Jimi ZACKA, PhD
              Exégète

 




P.S. : La rédaction de Thephila.com prévient les lecteurs contre toute utilisation de ses textes ne mentionnant pas la source et le nom de l’auteur de l’article comme cela a pu arriver.
 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.